Innoussa DAO, Designer

Innoussa DAO, Designer

Il travaille de ses mains, sculpte, vernit et embellit pour donner âme et vie au bois, aux objets et autres emballages perdus. Nous sommes à l’atelier d’Innoussa DAO, un designer mobilier qui nous fait découvrir le Centre Lukaré dont il est le directeur. Avec sa disqueuse, il polit, harmonise et adapte les objets à son goût et son environnement. Partir du néant pour donner des formes esthétiques et de nouvelles vies aux objets, ça s’appelle tout simplement de la création. Mais le travail d’un artiste designer et mobilier de surcroit demande certainement plus qu’on ne le croit de la créativité, d’efforts d’anticipation et de réflexion. Finalement, qui est “designer” par ces temps de galère qui obligerait certains à s’affubler de termes techniques et ronflants pour gagner sa pitance quotidienne ?

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Inoussa DAO (I.D) : A priorité, tout le monde peut être designer. “Mais être Designer mobilier, est encore plus compliqué parce qu’il faut connaitre le sens des couleurs, les tendances, savoir travailler et agencer les matériaux. Pour une formation de Designer mobilier, cela peut prendre 2 à 5 ans pour se dire Designer”, nous apprends inoussa DAO.

I.D  : Comment êtes-vous venu dans le métier ?

Dès le bas âge, j’aimais bricoler auprès de mon grand frère. C’est en 96 – 97 que j’ai commencé à prendre les choses en mains du fait que je dessinais déjà.

J’ai eu un parcours assez bien pour quelqu’un comme moi qui n’a reçu aucune formation académique et qui, aujourd’hui dispose d’un atelier, qui forme et partage ses expériences à d’autres personnes et aux des jeunes dans la sous-région et à l’international. De ce point de vue-là, je peux m’en féliciter. Au début, on avait tous des idées, on avait la matière et on travaillait au fur et à mesure. Nos multiples sorties en France m’ont permis de suivre des cours dans une école supérieure d’Art. Ce qui m’a donné le titre de “DESIGNER”.

I.D  : Quel est votre spécialité ?

Je fais de la récupération. Je détourne des objets dans la récupération pour donner une seconde vie en fabriquant du mobilier. Je fais de l’art utilitaire ; c’est à dire des tables de rangements, des bureaux, des chaises, beaucoup de choses.

I.D  : Quels types d’objets récupérez-vous ?

Nous récupérons un peu de tout. Tout matériel qui peut être réinventé pour redonner une seconde vie, nous n’hésiterons pas à le récupérer !

I.D  : Selon vous qu’est-ce qu’un Designer ?

Un Designer pour moi, c’est un innovateur ou un recycleur. C’est quelqu’un qui à partir d’un objet de masse arrive à le rendre plus beau et plus utile. Par exemple, il peut récupérer quelque chose qui a  été  jetée  et le réinsérer.  C’est aussi quelqu’un qui peut aussi donner un style, harmoniser les couleurs. Maintenant moi je fais du Design mobilier.

C’est aussi une personne qui sait adapter une chose à un environnement, à une place, qui peut à partir du néant lui donner une nouvelle vie. Ça c’est un Designer !

I.D  : A quel moment peut-on se dire designer ?

Tout le monde peut se dire Designer. Mais, je pense qu’être Designer mobilier c’est encore plus compliqué parce qu’il faut connaitre le sens des couleurs et les tendances, pouvoir les harmoniser, savoir travailler et agencer les matériaux. Pour une formation de Designer mobilier par exemple, cela peut prendre 2 à 5 ans pour se dire Designer.

I.D  : Est-ce une tradition familiale ?

Non ! Je pense que c’est un métier qui contamine si on peut le dire ainsi. Peut-être que c’est parce qu’en voyant mon grand frère travailler qu’est venue la motivation d’autant que j’avais déjà des prédispositions dans ce sens. J’avais la graine créative en moi dès le bas âge. Tous mes jouets sont fabriqués par moi-même. J’aidais les jeunes de mon âge aussi à faire des crèches de noël. Mais véritablement, c’est mon grand frère qui m’a poussé à m’exprimer dans ce design de mobilier.

I.D  : Selon vous qu’est-ce qu’un Designer ?

Un Designer pour moi, c’est un innovateur ou un recycleur. C’est quelqu’un qui, à partir d’un objet de masse arrive à le rendre plus beau et plus utile. Par exemple, il peut récupérer quelque chose qui a  été  jetée  et lui donner vie.  C’est aussi quelqu’un qui peut donner un style, harmoniser les couleurs.

C’est aussi une personne qui sait adapter une chose à un environnement, à une place, qui peut à partir du néant lui donner une nouvelle vie. Ça c’est un Designer !

I.D  : A quel moment peut-on se dire designer?

Tout le monde peut se dire Designer. Mais, je pense qu’être Designer mobilier c’est  encore plus compliqué parce qu’il faut  connaitre le sens des couleurs,  les tendances,  savoir travailler et agencer les matériaux. Pour une formation de Designer mobilier, cela peut prendre 2 à 5 ans pour se dire Designer.

I.D  : Quel est votre recherche artiste actuellement ?

Nous faisons du design mobilier et nous aimerions que dans les années à venir, que dans toutes les concessions burkinabè qu’on retrouve dans chaque famille des meubles fabriqués par des burkinabé. Quand on regarde aujourd’hui le développement, beaucoup s’équipent des meubles qui viennent de Dubaï, de la chine Mais localement, il n’y en a pas. Pourtant, nous pouvons proposer deux ou trois fois mieux que ce qui vient de l’extérieur. Mon combat actuellement, c’est ça et je pense que je suis en train de gagner une partie de ce combat parce qu’aujourd’hui, 50% de nos commandes ou de visiteurs sont des burkinabè.

I.D  : Quel est le coût de vos œuvres ? Sont-elles plus ou moins chères que celles de Dubaï par exemple ?

Au niveau des prix, tout dépend parce ce que qui compte pour nous, c’est la durée de vie du meuble. Pour ce qui nous concerne, il n’y a aucun de nos meubles où l’on te dira qu’au bout de 5 ans, il est usé. Non! Ce sont des meubles qui peuvent durer pendant 10, 20 ou 40  ans. Ce sont des meubles qui ne peuvent pas être au même prix que des meubles importés de chine où chaque année ou chaque deux ans, il faut remplacer. Pour répondre à votre question, nous sommes souvent un peu au-dessus des prix de meubles importés. Mais la consommation locale ne dépend pas uniquement des prix. C’est une question de mentalité parce que beaucoup de burkinabè se plairaient à dire toujours : “moi, mes meubles ne viennent pas d’ici, ça vient d’ailleurs”. En disant cela, ils se sentent dans une certaine fierté et dans un confort d’aisance que le voisin n’a toujours pas. C’est un challenge pour eux, ce qui ne devait pas l’être à mon avis.

I.D  : Où exposez-vous en général vos œuvres?

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Généralement, mes œuvres sont exposées à la boutique. On a une boutique au Village Artisanale de Ouagadougou. On a aussi des dépôts ventes dans de petites boutiques de la ville. Nous participons également à de nombreuses expositions dans la sous-région notamment au Sénégal, au Mali, à Cotonou, en Côte d’Ivoire et au Niger. On a des boutiques à l’extérieur qui nous passent des commandes en sous-traitance vers la France, l’Allemagne, le Canada et les Etats Unis. Qui nous commandent des  conteneurs  puis qui revendent dans leur boutique.

I.D  : Quel est votre public cible ?

Pour l’instant, ce sont beaucoup plus des expatriés. C’est quand, il y a des expositions que les burkinabè viennent nous visiter.

I.D  : Connaissez-vous d’autres artistes aussi talentueux que vous au Burkina ?

Il y a une fille du nom d’Adjaratou OUEDRAOGO qui fait de la peinture. C’est vraiment une fille qui se bat et qui est à féliciter. Je peux dire qu’elle a commencé devant nous et aujourd’hui, elle a monté sa propre structure. Elle fait des films d’animation et des tableaux. Elle dispose d’un grand espace de création et de résidence. Elle a aussi ouvert récemment un bistro avec nos meubles à l’intérieur. Je pense que c’est un modèle.

Ensuite Ky Siriki, l’initiateur du projet Laongo qui est aussi un grand frère. C’est grâce à lui  que beaucoup de portes s’ouvrent à nous à l’extérieur. Souvent quand on part à la biennale de Dakar, c’est par sa motivation qu’on y va pour montrer qu’au Burkina aussi il y a des artistes talentueux qui peuvent faire ceci et cela. Souvent, lorsqu’il  y a des foires, c’est lui qui nous amène aussi.

Enfin, il y a Christophe Sawadogo qui est aussi un peintre que j’admire beaucoup. Il travaille dans l’ombre mais c’est aussi un grand frère et un modèle. Il a exposé partout dans le monde.

I.D  : Pouvez-vous me parler d’une œuvre africaine (actuelle ou même traditionnelle) que vous trouvez importante?

Je ne parlerai pas d’œuvre, mais un artiste qui m’a inspiré. Il s’agit du sénégalais Ousmane Sow  (paix à son âme) qui a été l’un des premiers artistes africains ) rentrer dans l’histoire des artistes français.

I.D  : Qu’est-ce qu’il vous manque pour progresser ?

Il nous manque la clientèle ou plus précisément, un circuit d’écoulement pour nos produits. Nous souhaitons que les burkinabè consomment ce que nous produisons.  Si aujourd’hui, les institutions, les administrations publiques et privées burkinabè consommaient nos produits, nous serions très satisfaits. Nous ne demandons pas plus parce que c’est d’abord un minimum. Nous n’exigeons pas de financement, ni d’accompagnement. Ce que nous désirons, c’est que les burkinabé consomment ce que nous produisons. Je pense que tout devrait commencer par nos frères, nos sœurs et nos autorités politiques et administratifs avant que nos produits se portent mieux à l’extérieur.

Peut-être que c’est une question de culture de consommation parce qu’au Burkina, l’art plastique n’est pas encore enseigné à l’école, nulle part dans le cursus scolaire burkinabè. Or ce que nous présentons au public ne lui demande pas forcement une culture étendue dans la connaissance de l’art. C’est de l’utilitaire que nous proposons ; donc pas besoin de connaissance pour identifier un tableau, une chaise, une table de travail, un meuble de rangement ou autres. A partir déjà de l’art utilitaire, d’autres besoins de consommations peuvent rentrer en ligne de jeu telles la sculpture et les peintures.

Propos recueillis par Fatim BARRO

NDLR : Cet article a été rendu possible grâce au soutien financier de l’Agence Deneulin – www.deneulin.fr

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