Suite à l’appel à candidature lancé par le Ministère de la Culture, des Arts et du Tourisme pour l’appui aux initiatives culturelles et touristiques en décembre dernier, 75 projets ont été retenus. Après la publication officielle des résultats, nombreux sont les acteurs culturels qui sont tombés des nues. Certains qualifient même ces résultats de catastrophiques voire une insulte à l’intelligence des promoteurs culturels. Voici les réactions de quelques lauréats :
Georges KABORE, Promoteur du Centre Culturel Burkinabé ; ” ils se sont mal pris … ‘
C’est vraiment très minime pour un espace cultuel qui fait de la diffusion tout au long de l’année. Je pense que 400 000, 600 000 ne présente absolument rien pour un espace culturel. Peut-être qu’ils ont voulu montrer un élan de volonté politique. Si c’est même le cas, ils se sont mal pris parce que le ministère aurait mieux fait de se concentrer sur 2 ou 3 promoteurs que de disperser cet argent qui finalement, ne servira pas grand-chose à ces promoteurs. Moi j’aurai souhaité pour une subvention tournante. On subventionne cette année 2 ou 3 centres et l’année prochaine, d’autres centres peuvent en bénéficier. Imaginez un peu une somme de 800 000 pour des espaces comme le CITO, les recréatales d’Etienne Miningou ou Gambidi; à votre avis, que peut représenter de telles sommes au regard de leurs activités? A la limite, je dirai que c’est presque des injures.
C’est dommage et je doute fort que les autorités du Ministère de la culture puissent mesurer l’impact réel de cette subvention sur la vie de ces centres. Je ne sais pas trop ce que ces autorités attendent de ces aides mais encore une fois, je me pose la question de savoir ce que les promoteurs de ces subventions pourront bien en faire ?
Walib BARRA : Directeur de Vision Parfaite “il ne faut pas tout attendre du ministère de la culture “
Nous avons constaté la liste des bénéficiaires de l’appel à candidature du fonds pour le développement de la culture et du tourisme. Vision Parfaite en effet, avait postulé avec “la structure culture et espérance” de Paris. Nous avons travaillé sur le projet les journées culturelles du Burkina en France. Pour nous, ce volet entrait dans l’axe de positionnement des produits culturels Burkinabè à l’extérieur. Je constate que le projet n’a pas été retenu. Quand on regarde aussi la personnalité de monsieur Gaston KABORE qui est le président du jury, un homme de cinéma et de culture averti, on ne peut que saluer les résultats et peut être qu’on n’a pas eu la chance d’être retenu et que les prochaines fois, le projet pourra donc retenir l’attention des différents membres du jury. Nous félicitons par ailleurs les bénéficiaires qui ont été retenus.
Par rapport à la somme allouée à ces projets que pensez-vous de cela ?
Je pense que c’est 75 projets qui ont été retenus donc c’est clair que les subventions seront très maigres par rapport aux projets des uns et des autres. Peut-être que c’est une forme “de chercher à satisfaire la majorité” plutôt que de prendre un nombre très restreint; c’est ça une bonne politique culturelle, c’est-à-dire, satisfaire la majorité. Comme je le dis, il faut travailler à diversifier nos sources de financement; il ne faut pas tout le temps taper à la porte du seul ministère de la culture et du tourisme. Vous savez que ce ministère n’a même pas le 1% du budget national. Pour moi, je crois qu’il faut taper à d’autres portes et c’est comme ça qu’on arrivera à sortir de l’ornière; en tout cas c’est la devise de vision parfaite.
Honoré OUEDRAOGO, président du Groupe des Réseaux Associatifs et des Acteurs du Livre (GRAAL) ” Il faut un traitement quasi équitable”
J’approuve la démarche qui est une bonne en soi. Elle permet aux uns et aux autres de pouvoir bénéficier d’un certain soutien pour la mise en œuvre et surtout la bonne conduite de leurs différents projets.
Au regard de tout ce que j’ai pu retenir, les critères qui ont prévalu à ces choix-là ont été plus ou moins déclinés sans toutefois nous situer véritablement sur l’ensemble des critères notamment pour ce qui est de l’allocation financière accordée à chaque filière. Notre filière qui est celle du livre par exemple, j’ai constaté qu’ils ont plafonné le montant à 900.000 FCFA. Avec cette somme, je ne pense vraiment pas que l’on puisse monter un bon projet dans le domaine du livre. J’ai même échangé avec ceux-là qui ont postulé pour cet appel à projet et ils m’ont signifié que la plupart a déposé des projets dont le montant total avoisinait les 10.000.000 FCFA. Alors sur 10.000.000 frs, si vous accordez 900.000, qu’est-ce que l’on peut réellement faire avec ça ? Je crois que cela est une injustice. Tout secteur est porteur, donc Il faut un traitement quasi équitable de toutes les filières.
Dr Hamadou MANDE : Espace Gambidi ” C’est une défaillance grave ..et c’est même insultant .”
Nous saluons le principe qui a consisté pour le ministère de lancer un appel à projet pour accompagner les acteurs et les opérateurs culturels dans leurs actions quotidiennes; des acteurs culturels qui n’ont pas attendus nécessairement ce Ministère pour initier leurs activités
Mais ça été une grosse surprise, je dirai même ahurissant de voir qu’après tout un travail de sélection, que des projets qui ont été jugés pertinents, on leur alloue des sommes allant de 400.000 à 640.000. Là, j’avoue que je suis dans une situation d’incompréhension totale. S’il s’agissait de demandes ordinaires; c’est-à-dire, des opérateurs qui ont leurs activités et qui demandent un appui du ministère, je peux comprendre. Dans un tel cas de figure, même si le ministère donne 5 000 FCFA, je peux comprendre parce que le ministère a donné ce qu’il peut donner. Mais là, l’initiative vient du ministère de la culture qui a lancé un appel à projet avec des TDR, précisant le montant maximal à accorder (10 millions de FCFA).
Au regard des critères, les gens ont soumissionné parce qu’il s’agit d’un appel à projet et une opportunité pour les acteurs de mettre en œuvre certains de leurs projets qu’ils n’ont pas pu mettre en œuvre ou pour lesquels ils n’ ont pas eu d’accompagnement. Puis, les résultats tombent comme un Poisson d’Avril. Moi j’espère qu’un jour ils finiront par nous dire que c’était un poisson d’avril; parce que franchement si c’est sérieux, c’est catastrophique ! C’est vraiment un désastre de croire qu’avec 640.000 fcfa quelqu’un peut mettre en œuvre un projet de 10 millions. Du coup, on a l’impression qu’il y a un manque de sérieux dans l’analyse des problèmes et surtout dans les propositions de solutions qui sont apportées. C’est une défaillance grave et c’est tellement insensé comme action et j’espère que le ministère va se ressaisir très rapidement parce que là, c’est un faux pas et une erreur assez grave. A la limite, c’est même insultant aux yeux des opérateurs économiques. Au lieu de montrer aux opérateurs économiques que ceux qui interviennent dans le milieu culturel font un travail sérieux qui mérite d’être respecté, le Ministère a adopté une autre attitude. Comment voulez- vous que les partenaires qui interviennent dans la culture que ce soit au niveau du privé national ou qui interviennent à d’autres niveaux nous prennent au sérieux.
Je crois que le ministère aurait pu se garder de faire cette bavure.
La solution, il aurait été plus sensé de retenir 4 ou 5 projets et leur attribuer les montants plus ou moins à la hauteur de leur demande. Les autres projets pourront attendre les années suivantes.
La deuxième solution, c’est de refuser les subventions à tous ces projets compte tenu de l’insuffisance de l’enveloppe financière.
Martin ZONGO administrateur au CITO : ” La sagesse recommande d’attendre…”
A priori, nous avons été surpris par le montant qui a été alloué aux différents projets que nous avons soumis au ministère de la culture des arts et du tourisme. Parce que dans son énoncé l’appel à projet nous invitait à présenter des projets qui ne dépassaient pas le montant de 10 millions de FCFA. A la proclamation, nous avons vu pour ce qui concerne les arts du spectacle que les montants les plus élevés plafonnaient à 640.000fcfa. Évidement, on ne peut pas ne pas se poser des questions. Mais nous nous disons aussi qu’il faut éviter les réactions épidermiques. Nous pensons qu’il y a eu un comité qui s’est penché sur les dossiers, qui les a examinés, qui les a étudiés, qui a dû donc d’abord arrêter une philosophie de la gestion de ce fonds; qui a dû aussi se doter d’un certain nombre de critères d’appréciations et nous ne sommes pas pour le moment informés de toutes ces situations. Nous pensons donc que la sagesse recommande d’attendre plus d’explications pour savoir comment est-ce que les choses se sont passées et qu’est ce qui a guidé la décision de ce comité et pourquoi la répartition a-t–elle été ainsi faite. Peut-être qu’à écouter leurs arguments, nous comprendrons l’esprit qui les a animés, et en ce moment nous pourrons porter un jugement ou une appréciation qui soit fondée. Mais à priori comme ça, je préfère m’en tenir à l’étonnement, à la surprise mais me diriger surtout vers la recherche de l’information pour mieux comprendre. On peut condamner tout de suite et être informé demain qu’ils ont eu raison de faire ce qu’ils ont fait et en ce moment, la condamnation aurait été trop hâtive .
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