Boukary BONKOUNGOU, un bronzier talentueux et imaginatif

Boukary BONKOUNGOU, un bronzier talentueux et imaginatif

Analyse : Quelle est la valeur de l’art plastique dans la vie quotidienne de chacun de nous ? Cette question on se la pose permanemment avec beaucoup de subtilité de peur de froisser ou d’indigner ceux qui y croient ou qui vivent réellement de cet Art. Beaucoup (en Afrique surtout) ne voient pas l’importance de cet art ou alors parce que nous n’avons pas les mêmes regards portés sur les produits artisanaux. Rien donc d’étonnant si les artistes plasticiens africains dans leur majorité, malgré des œuvres de belles finitions n’arrivent pas à jouir véritablement du fruit de leur pinceau, de leurs toiles, sculpture, en un mot, de leur créativité.

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Boukary BONKOUNGOU, sculpteur-fondeur.

Si en Europe, l’art plastique fait le printemps et le beau temps pour sa valeur artistique et esthétique, en Afrique par contre, il se meurt ; non pas par faute de talents, loin s’en faut ! S’agit-il d’une question de culture, de goût ou d’intérêt ? La question reste toujours posée et sans une réponse appropriée, ces talents en Afrique pourraient bien disparaitre d’un jour à l’autre ; ce qui serait bien préjudiciable pour le secteur de l’emploi.  

Mais le débat que nous menons ou du moins, ce que nous évoquons n’est que le côté visible de l’iceberg car les professionnels de ce secteur comme Boukary BONKOUNGOU ont d’autres appréciations sur le sujet et des tas de bonnes raisons pour eux, de croire en l’art, d’espérer, de continuer de sculpter, de peindre ou de fondre.

A travers cet entretien, il nous entraine dans son univers de bronzier-fondeur, un métier passionnant qui ne manquerait pas de vous accrocher et de vous embarquer également à bord de son navire de cire d’abeilles et de bronze. Suivons donc l’artiste dans son atelier sis au secteur 10 de Ouagadougou.

Boukary BONKOUNGOU est un artiste plasticien burkinabé sculpteur-fondeur. Né d’une famille de bronziers il a appris à modeler la cire d’abeille, à allier bois et bronze et ce, depuis maintenant une vingtaine d’années. C’est ce qui fait de lui, un professionnel du Bronze, talentueux et créatif. Mais toutes ses qualités, l’artiste sait qu’il les doit en tout premier lieu à sa famille et c’est d’ailleurs ce qu’il nous confirme :

Boukary BONKOUNGOU  (B.B) :  La famille Bonkoungou est une famille de fondeurs de bronze. On est née trouver notre père travailler sur du bronze. Après l’école, nous avons suivi les pas de notre père. Aujourd’hui, je suis artiste parce que j’ai fait 11 ans au Centre National Des Arts (CNA) où je me suis formé. Au fil du temps et avec la pratique, j’ai compris que je pouvais mélanger le bois et le bronze et adopter pour en obtenir d’autres produits.

Artistesbf : Comment avez-vous appris la technique ?

Je l’ai apprise auprès de mon papa.

Qu’est-ce qui vous a donné envie de faire ce travail ?

J’ai voulu créer d’autres choses en dehors de l’artisanat. Quand je suis arrivé au CNA , j’ai vu une diversité de créations qui me plaisaient les unes que les autres. Je me suis donc lancé dans la création en alliant bois et bronze, une technique qui n’existait pas encore. Les produits résultant de cet alliage sont assez satisfaisants et j’ai donc poursuivi. Aujourd’hui, j’ai 20 ans de carrière artistique.

La première œuvre de l’artiste a été de réaliser des personnages âgés.

Est-ce une passion ou pour un gagne-pain que vous faites ce métier ?

Ce n’est pas une question d’argent. Ces objets que vous voyez-là ont été fabriqués depuis deux ans. Je peux faire une année sans rien vendre. Ma dernière vente remonte au mois de décembre où j’ai vendu une de mes sculptures à 1 million. Et depuis lors, je n’ai plus rien vendu. Vous comprenez que si c’était une question d’argent, j’avais déjà raccroché.

Quelles sont les raisons de cette mévente ?

Ce n’est ni une absence de promotion ni une maque d’exposition. En 2015 par exemple, l’institut Français m’a invité à exposer. Mais il faut que vous sachiez que l’art ne tourne pas autour de l’argent. L’art n’est pas comme de la “bouffe”, ce n’est pas comme des voitures ou des motos dont tout le monde a besoin. Ils sont très peu sinon rares, ceux qui s’intéressent à l’art.

C’est occasionnellement que j’arrive à vendre ; là aussi, il peut s’agir d’un ami qui veut me faire plaisir.

Une sculpture présentant des scolaires

Quels sont les matières premières que vous utilisez ?

C’est le bois, la cire d’abeille et le bronze.

Après la formation au CNA, quel a été le tout premier objet que vous avez réalisé en bronze ?

C’était un couple de sages, des personnages âgées (un homme et une femme)

Quels sont vos moments d’inspiration ?

On dit que “ventre plein, nègre content”. C’est une manière de vous dire que je n’ai pas spécifiquement des moments d’inspiration en tant que tel. Mais véritablement, quand je suis content. Lorsque je suis de bonne humeur, tout se passe bien. Mon meilleur temps d’inspiration, c’est aussi quand j’arrive à vendre une de mes sculptures et que cet argent me permette de produire d’autres objets.

Une scène de déménagement pour rappeler les évènements du 1er septembre 2018 au Burkina.

Comme recherche artistique qu’avez-vous envie de fabriquer ?

Aucune idée !  Mais l’avenir nous le dira.

Où exposez-vous vos œuvres ?

J’exposais mes œuvres dans les espaces culturels et à la “Villa Yiri Suma”.

Connaissez-vous d’autres artistes aussi talentueux comme vous ?

Oui j’en connais. Il y a Abou Sidibé qui est sculpture, qui taille le bois et qui fait de la récupération avec du fer. Aujourd’hui, il y a peu de sculpteurs au Burkina parce que c’est un travail   dur. C’est très difficile de confectionner un objet.

Aujourd’hui qu’avez-vous comme besoin pour améliorer votre travail ?

Il n’y a que les moyens, le nerf de la guerre. Malheureusement, les objets ne s’écoulent pas. Il me manque des canaux d’écoulement. Ceux qui peuvent acheter ces œuvres ne sont pas nombreux au Burkina ; ils sont en Europe. Même si un burkinabé a des millions, il n’achètera pas nos sculptures   pour sa maison. Alors, mon souhait est de trouver des partenaires en Europe pour m’aider dans la distribution et dans la promotion de mes sculptures. S’il y a des expositions en Europe et avec du soutien, on peut y participer car le bronze, comme vous le voyez, est lourd à transporter.

Propos recueillis par Patrick Coulidiati et Fatim Barro

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