David Hervé HONLA, Journaliste

David Hervé HONLA, Journaliste

Notre invité de la semaine vient du Cameroun. Il aime les voyages, les contacts et surtout la communication. Hervé HONLA, c’est de lui qu’il s’agit est l’aîné de sa famille. Né d’un père enseignant d’université, Mr HONLA a quitté son “DOUALA” Natal, histoire de vivre loin des parents, vivre sans leur appui pour se frotter aux réalités de la vie.
En effet, c’est depuis 2003 que Hervé HONLA réside au Burkina. Son domaine de prédilection : la Communication ou plus précisément, le journalisme culturel. Ancien collaboration du Journal “l’Observateur Dimanche”, il est connu pour ses écrits poignants et ses critiques souvent acerbes à l’endroit des artistes. Convaincu de l’importace de la communication dans la promotion et la visibilité des artistes burkinabé, il lance le 10 janvier 2013 sa propre structure de communication dénommée ‘JABBAR COMMUNICATION”
Aujourd’hui, Hervé HONLA n’est pas seulement que Camerounais; il est aussi Burkinabé pour diverses raisons : d’abord pour avoir vécu 10 ans avec des burkinabé. Ensuite, burkinabé par alliance, parce qu’il est père d’une petite fille née d’une mère burkinabé. Enfin, c’est un homme qui, pendant 10 ans s’intéresse à la culture du pays des Hommes intègres. Pour cette bonne cause, il s’est toujours donné corps et âme à travers ses écrits même si quelque fois, sa plume irrite et heurte les sensibilités … Tant mieux s’il dit n’avoir aucune intention dans ses écrits de blesser, de frustrer ou d’humilier …. C’est autant d’éléments qui nous réconfortent dans notre questionnement à savoir, si Hervé HONLA n’est pas tout simplement un journaliste incompris ou peut-être, aurait -t-il une longueur d’avance sur son lectorat ?
Pour notre part, il reste une personne ressource qui a son mot à dire sur la culture burkinabé pour avoir été pendant 10 ans un témoin privilégié de l’éffervescence artistique au Burkina.

Hervé HONLA (RVH) : Je suis camerounais résidant au Burkina depuis 2003; cela fait exactement dix ans que je suis là. J’ai commencé le journalisme en 2000 au Cameroun (Douala) dans une structure qu’on appelle “le messager”. Au début, je faisais la caricature et c’est après que l’envie m’est venue de faire l’aventure, histoire de changer de pays, de me frotter aux autres et d’approfondir mes connaissances dans le métier du journalisme. Hésitant entre plusieurs pays, c’est finalement le Burkina qui m’a séduit.
Parlant du Cameroun, le célèbre chanteur Francis Bebey disait “je vais chercher là-bas une vie meilleure …” Et vous laissez un si beau pays, cette vie meilleure, pour vous installer au Burkina ? Que s’est-il passé ?
Aucun problème ! Etant donné que je suis l’aîné de ma famille, les gens n’ont pas apprécié le fait que j’ai quitté la famille; ils disent que j’ai un peu brisé les barrières coutumières. Chez nous, l’aîné généralement doit toujours rester en famille. Il en est le garant; c’est plutôt les petits frères qui vont en aventure. Pour ce qui me concerne, j’avais voulu tout simplement m’éloigner des parents, vivre sans leur appui pour forger en moi une certaine personnalité. Si vous voulez, c’était vraiment contre leur gré qu’ils m’ont laissé partir en aventure.

Art : Dame rumeur dit que c’est pour de raisons politiques que vous avez fui le Cameroun ?
RVH : Je n’ai jamais fait de la politique, jamais !. Quand je quittais le Cameroun, j’étais encore très jeune. Je suis parti parce que je le voulais; c’est ma décision personnelle. C’est vrai que j’étais un peu bouillant et un leader dans les différents mouvements scolaires et estudiantins. J’aimais toujours prendre la parole en public pour partager mes opinions et me faire remarquer par mon courage. C’est vrai, j’aimais prendre des risques; on me l’a toujours dit.

Art : A plusieurs reprises, vous avez été pris à parti soit par des collègues soit par des artistes. Il semble que vous n’êtes pas tendre dans vos écrits, vous êtes très dur dans vos critiques. Quelle est votre réaction?
RVH : Nous sommes dans un monde de ” télé-réalité” où les gens aiment jouer au semblant. J’ai grandi en étant moi-même; en étant ce que je suis. Quand je me suis retrouvé dans le journalisme, je me suis dit pourquoi faire tout le temps ce que les autres ont l’habitude de faire? Faire du reportage et écrire ce que les gens veulent entendre ou ce qu’ils veulent voir ? Pourtant, il y a beaucoup de choses qui se disent en ” OFF ” que les gens ne savent pas. C’est pourquoi, j’ai décidé de dénicher ce qu’on cache, dire tout haut ce que les gens disent tout bas. C’est cet esprit qui se ressent au niveau de mes écrits. Voilà pourquoi, j’aime beaucoup échanger avec les gens de tout et de rien pour faire ressortir un peu ce que les autres journalistes n’ont pas l’habitude de dire aux gens. C’est ce côté caché que je mets à la “UNE” ou que j’étale devant les médias parce que je me dis que les gens ont besoin d’écouter, de voir, d’entendre d’autres choses… Mais je ne le fais pas seulement qu’en mal; je le fais aussi en bien. Heureusement, que la plupart des faits sur lesquels j’écris sont vrais.
Contrairement à ce que les gens pensent, je n’écris pas au hasard. Je sais que parfois mes écrits choquent, mais je prends quand même le temps de réfléchir et de vérifier la qualité de l’information. Souvent même, mes écrits font du bien à la personne indexée. Et puis, les gens mêmes aiment ça ! Ils aiment le sensationnel. Nous vivons dans le sensationnel, dans un monde sensationnel. Quand vous voyez des événements qui se passent dans le monde entier quand ça sort de l’extraordinaire, c’est du sensationnel; ça crée un buzz sur le plan médiatique et dans le monde entier. Moi j’aime ça; ça me plaît le sensationnel !
Comme je l’ai dis au départ je suis quelqu’un qui aime prendre les risques. C’est vrai qu’il y a des conséquences qu’il faut savoir assumer; et moi, je les assume. Il y a quelques mois de cela, j’ai écopé une suspension d’un mois au niveau de ma rédaction, tout simplement parce que j’avais osé pendant une conférence de presse, irriter un artiste. C’est vrai, je l’ai expressément fait pour qu’effectivement cet artiste sorte de ses gons, qu’il puisse me dévoiler ce qui me semblait caché; c’était ça mon objectif. Mais ce qui est bizarre dans tout ça, les mêmes personnes avec lesquelles j’ai souvent des petites “bisbilles” sont mes meilleurs pots.
Art : Vous avez créé récemment une structure de communication “Jabbar communication” Quelle sera sa mission ?
RVH : Effectivement, la structure s’appelle ” Jabbar communication” . C’est une agence qui appartient à la famille notamment à ma femme qui est la principale responsable. C’est une Agence Conseil en Communication Culturelle (ACCC). J’ai remarqué qu’il n’y a pratiquement pas beaucoup d’artistes burkinabé connus sur le plan international; Je ne vous apprends rien parce que vous le savez vous-même !. Ensuite, il n’y a pas suffisamment de communication pour les artistes burkinabé. J’en veux pour preuve les nombreux coups de fils que je reçois quotidiennement pour des besoins de presse- book ou de conférence de presse. C’est partant de ce constat que je me suis dit qu’il y a un manque à gagner quelque part. Du fait déjà que les gens me connaissent pour mes écrits poignants, je ne me vois pas en train de toujours magnifier les artistes; s’ils font des œuvres de belles factures, je le dirai en toute sincérité; mais si c’est mal, je le leur dirai aussi. Donc, si je veux réellement communiquer, ce n’est pas en étant sous la tutelle d’un autre organe de presse. La solution, c’est de disposer de ma propre structure parce que j’ai une autre vision journalistique. C’est pourquoi, j’ai donné mon accord à ma femme de créer ” JABBAR COMMUNICATION”. C’est ma manière à moi d’aider les artistes au niveau de la communication mais surtout, de créer un pont entre les artistes burkinabé et les acteurs culturels à l’international.

Art : Est- ce que vous n’avez pas peur que d’ici là vos rapports s’arrêtent avec l’observateur Dimanche ?
RVH : En fait, je pense que j’ai toujours gardé des liens très fraternels et très cordiaux avec l’observateur du dimanche. Je suis un collaborateur à l’observateur Dimanche; c’est un journal qui m’a toujours soutenu et qui continue de me soutenir. En créant cette structure de communication, je ne viens pas comme un opposant ou comme un concurrent de l’Observateur Dimanche.
Art : A votre avis qu’est ce qui fait que notre musique qui n’a plus rien à envier aux autres musiques, a du mal à se positionner à l’international ?
RVH : Fondamentalement, je dirai d’abord que c’est le manque d’expérience parce que tout le monde a embrassé le métier de la musique sans règle. Beaucoup des gens au départ, sont venus du fait du manque d’emplois. Au fil du temps, on y prend goût sans se rendre compte qu’on a des insuffisances ou des lacunes; c’est clair ! Beaucoup n’ont pas jamais été formé pour ce métier. De là, on comprend aisément pourquoi notre musique a du mal à se propulser au devant de la scène. Je vais prendre des exemples très pathétiques. Au niveau des artistes, ils sont nombreux à ne pas savoir qu’il faut se faire former. Ensuite, ils ne savent pas qu’ils doivent s’entourer d’un staff managérial, qu’ils doivent communiquer à l’intérieur comme à l’extérieur et nouer des contacts avec d’autres artistes. C’est vrai que ce sont des autodidactes, mais ils doivent se former permanemment.
Le deuxième point concerne le staff, c’est à dire les managers et tous ceux qui gravitent autour des musiciens. Au niveau des managers justement, c’est un nouveau métier qui a dix ans d’existence au Burkina. C’est un métier que les artistes et les managers eux-mêmes n’arrivent pas souvent à percevoir. A mon avis, les managers ne pensent pas, à la carrière de l’artiste; ils pensent d’abord à la leur. Je pense que c’est peut être ça qui cause souvent des petites bisbilles entre eux. Le manager veut d’abord s’épanouir au détriment de l’artiste. Il ne sait pas que le premier objectif, c’est d’épanouir l’artiste. J’ai même l’impression qu’entre le manager et l’artiste, il y a comme une rivalité au niveau de la notoriété. Le manager veut être une star au même titre que l’artiste. Prenons l’exemple des artistes comme Tiken JAH, Alpha BLONDY ou Youssou N’DOUR. On a du mal à connaître leurs managers parce que tout simplement, les managers de ces artistes sont toujours restés en arrière plan. Mais au Burkina, c’est tout à fait l’inverse !
Il y a des managers qui aiment qu’on les appelle au téléphone pour leur dire que leur artiste va prester. Puis ils sont calés; ils ne font plus rien; aucun travail ! Ils s’asseyent et ne font aucun planning avec l’artiste, ne serait-ce qu’hebdomadairement ou trimestriellement. Le rôle du manager n’est pas de s’assoir avec son téléphone et de communiquer à longueur de journée son adresse à ses amis et aux journalistes en leur disant que “je suis désormais le manager de tel artiste; quand vous aurez besoin de l’artiste, appelez moi !”. En fait, ils se contentent juste des événements comme le FESPACO, le SIAO, la SNC pour demander à placer leur artiste.
Enfin, il faut que les managers fassent preuve de professionnalisme. Les managers et les artistes doivent disposer de comptes bancaires. Cela donne de la crédibilité et témoigne d’une certaine sincérité dans ce que l’on fait. Sinon, que constatons-nous ? Dès que le concert finit, le staff et l’artiste se retrouvent rapidement soit dans une salle de ciné, soit dans un coin faiblement éclairé, sous un arbre, dans le noir pour faire le point des recettes. Je pense que ce n’est pas professionnel. Voilà pourquoi les banques ont souvent du mal à leur faire confiance. C’est ce qui amène les sponsors à dire souvent que c’est un milieu instable; si ce n’est pas l’artiste qui a trahit son manager, c’est donc l’autre. Dans de telles situations, les banques ne peuvent pas nous accompagner parce que nous ne leur donnons pas suffisamment de garantie sérieuse.

Art : Les journalistes culturels jouent-ils correctement leur rôle ?
RVH : C’est vrai, c’est toute une chaîne. D’abord, le journaliste culturel doit aller vers l’information, c’est ce que je fais d’ailleurs (en tout cas, je peux me vanter pour ça). Aujourd’hui, La plupart des journalistes sont trop bureaucrates; ils attendent des correspondances pour aller sur le terrain. Leur sortie est conditionnée par des perdiems. C’est là, à mon avis qu’il faudra travailler à corriger parce je pense qu’il faut prendre des initiatives privées : Aller vers l’information, susciter la curiosité, sortir de l’ordinaire pour écrire un bon article, cela est aussi valable tant au niveau de la radio que de la télé. Quand un journaliste décide de promouvoir au niveau de sa radio l’album d’un artiste et qu’il appelle l’artiste pour lui dire : “Ecoute, je suis entrain de jouer ta musique, qu’est ce qu’on fait?” De telles pratiques qui vont grandir le métier. Je pense que chacun, doit faire son travail et bien. Aussi, que nos journalistes culturels ne se contentent pas de faire du bien parce qu’on leur a demandé de faire du bien. C’est de dire surtout et de façon objective, la manière dont les choses se passent dans le journalisme culturel. Malheureusement, pendant que les uns sont beaucoup plus critiques, les autres se font soudoyer.

Art : La situation économique des journalistes culturels dans certains organes de presse seraient lamentables. N’est-ce pas cela qui serait à l’origine de certains dérapages professionnels ?
RVH : Je pense qu’on ne vient pas dans ce métier pour s’enrichir. On vient dans ce métier parce qu’on a un certain nombre de valeurs à partager. La culture est un domaine porteur et c’est à nous journalistes culturels de faire en sorte que nos gouvernants aient un regard sur ce secteur. . L’interview que vous me faites par exemple n’est pas rémunérée mais vous le faites quand même ! tout simplement parce que justement, vous aimez votre métier.
Je reviens sur votre question qui pose le problème de la conjoncture. La conjoncture existe dans notre métier. Voilà pourquoi de plus en plus, les journalistes qui travaillent dans les différentes structures font des activités parallèles pour arrondir leur fin du mois. Mais sincèrement parlant, il n’y a vraiment pas de l’argent dans notre métier et il faut que les directeurs des maisons de presse soient très regardants sur la question. Le Journaliste doit être à l’abri de tout ce qui pourrait l’exposer à la mendicité parce que c’est un métier noble.
Votre dernier mot?
RVH :Juste pour encore souhaiter mes vœux les meilleurs à “ARTISTEBF”. Aujourd’hui, sur 3 ou 4 organes de presse culturels, ARTISTEBF est omniprésent dans presque tous les évènements culturels. C’est la preuve que les gens aiment bien ce que vous faites.
Je voudrai enfin rassurer les lecteurs et tous les artistes que je n’ai à aucun moment eu l’intention dans mes écrits de nuire, de frustrer ou d’humilier qui que ce soit.
Bon courage à vous et le débat doit être ouvert. Je vous remercie.
Artistebf, Avril 2013

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