Amity Méria, artiste musicenne

Nous avons choisi cette semaine de rencontrer Amity Méria, une artiste musicenne burkinabé.Titulaire d’une licence en lettres modernes, Amity Méria est l’une des plus célèbre femme artiste du Burkina Faso. En 2004, elle est nominée “Meilleure Artiste d’Afrique de l’Afrique de l’Ouest” par les Koras (All Africa Music Awards) en Afrique du Sud. Enfin, depuis 2004, elle est restée jusque-là, la seule dame lauréate au KUNDE D’Or . La particularité de notre invitée c’est qu’elle fuit les médias : timidité, discrétion ou modestie, nous ne saurons vous le dire. Retenons simplement que Maraim DRAME (son nom à l’Etat Civil) a réalisé son premier album en 1991; cela fait donc 20 ans qu’elle est dans la musique. Quel sens donner à un tel record ? Amity MERIA explique :


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Amity Meria (AM) : Je suis chanteuse originaire du Burkina Faso. Mon premier album est sorti en 1991 ; cela fait 20 ans que je suis dans la musique. Je m’apprête d’ailleurs à lancer la célébration de ces 20 ans de carrière musicale probablement en Décembre prochain. Nous aurons des activités qui vont s’étendre sur toute l’année 2012. Pour la célébration, je prévois organiser une soirée caritative où les personnalités pourront se procurer mes albums de façon symbolique. A cet effet, nous avons ciblé 6 structures œuvrant dan le social à qui nous allons reverser la vente de ces produits. C’est une manière à moi en tant qu’artiste de soutenir de façon indirecte toutes ces associations qui œuvrent dans le social.

Artistebf (Art.) : Quel sera le programme ? Qu’est-ce que le public pourra attendre de cette célébration ?
AM : (rires ) Ce sera un dîner Gala avec beaucoup d’artistes. Pour le moment, je me garde de citer des noms. Mais je peux vous rassurer que j’ai eu l’assurance de nombreux artistes qui m’ont confirmé leur participation. Des journalistes étrangers seront également de la partie. Après le lancement, nous comptons organiser une série de concerts dans les 13 régions du Burkina faso.

Art. : Vous voulez reverser les ventes de vos produits à des structures œuvrant dans le social ; que peut-on voir derrière votre geste ? un acte hautement politique ?
AM : Politique ? Bon (rires) . Si vous pensez que l’humanitaire c’est la politique, je ne pourrais rien dire. Mais à ce que je sache, je ne suis dans aucun parti politique. L’artiste est un peu le reflet de la société dans laquelle il vit. A travers cet acte, je crois plutôt que c’est une manière à moi de dire merci simplement au Burkina Faso, merci à toute l’humanité pour la grâce que j’ai bénéficiée tout au long de mes 20 années de carrière musicale.

Art. : Cela fait 20 ans que vous chantez; combien d’albums avez-vous produits à ce jour ?
AM : A la date d’aujourd’hui, j’ai 6 albums. Chaque 3 ou 4 ans, je réalise un album. Sans vraiment me prendre la tête, le 7 ème est en préparation. A l’occasion justement de mes 20 ans de musique, je suis en train de confectionner des coffrets avec tous les 6 albums. Ces coffrets contiendront près d’une cinquantaine d’œuvres comprenant des photos de scènes, des photos relatant les moments forts de ma carrière. Des livrets vont être également insérés dans chaque coffret. En fait, c’est une manière pour moi de rappeler tout ce que j’ai fait pour les mélomanes et aussi, une façon de pouvoir me repositionner surtout côté PRESSE.

Art. : Amity, vous paraissez sobre; les uns vous trouvent très réservée; les autres vont plus loin et vous trouvent très belle pour rester si simple. Alors que cachez-vous derrière cette modestie ?
AM : Je ne sais pas trop quoi vous dire. Mais je crois que j’essaie de rester moi-même dans tout ce que je fais. Ce que j’ai appris dans la musique, c’est la vie en harmonie avec mon entourage. Et dans la recherche permanente de cette harmonie, je pense qu’il faut être assez humble, être à l’écoute de l’autre afin de raffermir les liens et pouvoir avancer ensemble. Je ne me plains pas ! je veux rester telle que je suis et non vouloir paraître forcément sous une image qui n’est pas moi. J’aime la sincérité dans tout ce que je fais. Et voilà … Je n’ai plus rien à dire. Vous êtes en train de me juger n’est-ce pas ? …! (rires).

Art. : La 11è Edition du KUNDE vient de fermer les rideaux étouffant du même coup tous les espoirs qui voyaient déjà en SISSAO comme la seconde femme à lever le défi. Quelles ont été vos impressions à la proclamation des résultats ?
AM : (toute émue et désespérée) Vraiment, je ne sais plus ! Sincèrement, être la seule femme à obtenir le KUNDE d’ Or depuis 11 éditions, commence à me peser lourd sur les épaules. J’ai toujours souhaité qu’au moins une fois une autre femme puisse arracher le KUNDE des mains des hommes. Néanmoins, je reste optimiste et je sais que ça viendra parce qu’aujourd’hui, nous avons de jeunes artistes qui évoluent positivement. Je ne doute pas que la relève féminine est assurée.

amety1.jpgArt. :Avant le verdict, quel était l’artiste que vous attendiez à l’arrivée ?
AM : Tous les artistes se valent. Vraiment, je les aime tous ! Mais en matière de compétition, c’est du domaine de la sensibilité. Ce n’est pas quelque chose de cartésien où 1 + 1 font 2. En fait, ce sont des artistes pour lesquels j’ai beaucoup de respect. Après tout, ce n’est qu’une compétition.
Art. : Vous étiez classée 4 ème aux KORA 2010 et certains disent que vous n’étiez pas du tout contente pour ce classement. Avez-vous senti quelque chose de flou en rapport au prix que vous avez obtenu ?
AM : Non pas du tout ! ce n’était pas en rapport avec le prix . Comme je le dis souvent, une compétition est pour moi un jeu. Le fait d’être nominé par les KORA comme meilleur artiste du continent africain, est déjà bien et même très important pour l’artiste que je suis. Seulement, j’ai été étonnée de voir le clip qu’ils ont diffusé parce que je ne m’attendais pas du tout à la diffusion de celui-là; encore moins que je ne l’avais pas du tout demandé. C’est le clip de Promo “BILAI” que nous avons remis pour diffusion et nous avons été surpris de voir un autre clip diffusé à la place.
Art. : Vous êtes une grande intellectuelle et on a remarqué que vous chantez généralement en Dioula. Ce choix est –il une fois de plus un message à la jeunesse ?
C’est vrai que la plupart de mes chansons sont en dioula ou en Bambara. Mais il m’arrive souvent de chanter en français et même en Anglais pour rechercher plus d’ouverture. En tant qu’artiste, je me sens mieux dans ma culture et qui dit culture, dit aussi langue avec tout ce qu’elle comporte comme onomatopées, proverbes, sagesse à décortiquer. C’est une richesse africaine qu’il faut savoir exploiter et c’est ce que je fais pour le bonheur des mélomanes.
Art. : Amity est une femme qui évolue dans le SHOW BIZ, est-ce facile pour la femme que vous êtes ?
AM : (rires). Là, je ne vois pas de discriminations. Chacun se bat et ce n’est pas parce qu’on est femme qu’on ne peut pas exceller dans le SHOWBIZ. Chaque domaine d’activités présente ses avantages et ses inconvénients. Le plus important c’est de savoir tirer les leçons de nos échecs et de rester toujours positif, optimiste et vivre d’espoir ; je crois que c’est tout naturellement humain. Autrement, je ne vois pas de contraintes qui puissent empêcher une femme d’exercer ce métier ou à évoluer dans le SHOWBIZ.

Art. : Finalement, que retenez-vous de la musique burkinabé pendant ces 20 dernières années ? D’abord du point de vue des acquis.
AM : A mon avis, en matière de musique il n’ y a jamais d’acquis; chaque album a son histoire et chaque activité est un perpétuel recommencement. J’ai beaucoup appris tout au long de ma carrière ; j’ai appris à me remettre constamment en cause et constamment au travail. Rien ne sert de vouloir dormir sur ses lauriers. Tant qu’il y a la vie et la santé, il faut toujours continuer d’apprendre. Il n’y a pas un moment où on peut s’arrêter et dire : ” voilà, c’est bon comme ça ! j’ai suffisamment fait et j’ai atteint le sommet ! ” Sincèrement, ce n’est pas sous cet angle que je vois la musique. Pour moi, la musique a toujours été de nouvelles histoires et de nouvelles découvertes. A chaque fois que je voulais réaliser un nouvel album, c’est comme si je revenais à la case départ. C’est en se remettant perpétuellement en cause et en travaillant sans relâche que nous arrivons à maintenir une carrière. Il faut éviter de tomber dans l’auto-satisfaction. En musique, Il faut se fixer des objectifs, travailler à les atteindre . Lorsque vous les atteignez, on se trace de nouveaux défis et de nouveaux objectifs à atteindre.
D’un point de vue général, la musique a eu des acquis. A mes débuts par exemple, il n’y avait même pas de structures de production au Burkina. Même pour presser nos produits, nous étions obligés d’aller dans d’autres pays. Donc sur le plan d’infrastructure, il y eut beaucoup d’avancées. Sur le plan technique, la musique a progressé avec tous ces nouveaux logiciels et ces nouvelles technologies qui permettent facilement aujourd’hui de faire de la musique. Cependant, face à cette technologie de pointe, on assiste à une musique beaucoup moins naturelle, moins acoustique et beaucoup plus virtuelle. C’est vraiment déplorable que la musique virtuelle soit en train de prendre le pas sur la musique naturelle. Cette situation fait que nos instrumentistes ont de moins en moins l’occasion de s’exprimer véritablement. Quand on ne pratique pas de façon assidue quelque un art, on finit par perdre la main. C’est clair ! Sur ce plan justement, je dirai que la musique a pris un coup. C’est vrai qu’il faut vivre avec son temps ; mais en attendant, il y a des musiciennes d’une certaine génération, comme nous autres qui continuons de croire à la musique acoustique.
Art. : Et du point de vue difficultés. Est-ce que notre musique souffre ?
AM : Je pense que beaucoup d’artistes seront d’avis avec moi que la qualité du jeu musical a baissé au profit du virtuel. C’est quand même une difficulté parce qu’il y a tout un monde d’instrumentalistes (pianistes, guitaristes, flutistes et autres balafonnistes) qui sont de plus en plus en retrait. C’est vraiment très dommage que ces instrumentistes qui ne vivent que de ce métier, n’aient plus l’occasion de s’exprimer. Ensuite, à la faveur des nouvelles technologies dont on parlait tantôt, la piraterie a pris énormément de l’ampleur. Il y a juste quelques années, on vendait facilement nos support CD. Aujourd’hui, personne n’achète quoi que ce soit puisqu’avec la piraterie on peut tout acquérir.
Vous conviendrez donc avec moi que si l’artiste n’arrive plus à vendre ni à s’exprimer en live, c’est tout un monde qui s’écroule. Mais que peut-on faire dans la mesure où des solutions de facilités sont là et pour des raisons économiques, beaucoup préfèrent que les artistes prestent en playback. Sérieusement, à chaque fois qu’il m’arrive de jouer en play-back, j’ai très mal au cœur parce qu’à quelque part, je sens que je suis en train de trahir quelqu’un. Il en est de même pour le public qui me regarde. Je sens que je trahis mon public aussi puisqu’en réalité, en playback, je ne chante presque pas. Ce que je vous dis, c’est purement personnel; d’autres vous diront par contre que c’est bien.
Enfin, la culture doit accompagner les artistes de façon globale comme ça se passe d’ailleurs au Burkina. Nous sommes dans un pays sous développé où tout est prioritaire. Alors, s’il faut tout attendre du Ministère de la Culture, ça va être difficile puisqu’ il n’ y a pas que seulement la musique. Vous avez également le théâtre, le cinéma, les arts plastiques et dans un soucis d’équité, il faut satisfaire chaque catégorie. Ce qu’on a toujours s

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