Artistes du Burkina : une mutuelle de santé, comme solution à la précarité

Artistes du Burkina : une mutuelle de santé, comme solution à la précarité

Enquête : Il est vrai que le secteur culturel n’est pas le seul à souffrir de structuration, le lieu où les acteurs manifestent le moins de solidarité à l’endroit des autres. Mais lorsqu’on est une communauté citoyenne totalement marginalisée du fait de la précarité du métier et de l’insécurité financière, quand la tutelle administrative n’offre pas de plan de carrière, le seul mot qui doit compter pour les artistes du Burkina, c’est la solidarité.

Friedrich Nietzsche dit que  » L’artiste a le pouvoir de réveiller la force d’agir qui sommeille dans d’autres âmes ». Nous pensons que les artistes burkinabè pouvaient s’en inspirer. A défaut de prévenir un mal, ils pouvaient réfléchir à comment préserver leurs vieux jours.Cette idée a-t-elle effleuré les esprits ? Mystère !

La difficile mise en place d’une mutuelle de santé ou d’une caisse de prévoyance sociale

Déjà en 2010, l’artiste musicien Serge Bambara /Smockey très désemparé par le décès brutal de Djata Illébou évoquait l’idée de création d’une mutuelle de santé. Mais le silence qui s’en suivi depuis cette date expliquerait les difficultés à matérialiser l’idée de la mutuelle.

Serge Bambara alias Smockey/

 » Ils sont nombreux les artistes du Burkina à pointer du doigt d’une part, leur ministère de la culture, des arts et du tourisme d’avoir une mauvaise volonté pour la création d’une mutuelle qui pourrait aider les artistes qui, selon eux serait la seule solution.Mais des querelles internes entre artistes ne seraient pas favorable à cette décision », à laissé entendre Smockey.« Les artistes n’ont pas tous la même vision, ils ne sont pas tous dans le genre musical ; donc il y a déjà des fossés en fonction des genres », poursuit-il « . video

Lire aussi : L’artiste burkinabè, de la gloire au calvaire

A propos de cette difficile mise en place d’une mutuelle de santé pour les artistes du Burkina, le comédien Rasmané OUEDRAOGO pointe du doigt le Ministère de tutelle qui n’aurait pas fait franc jeu.

Rasmané OUEDRAODO alias RASO/ Comédien

«  Il faut dire que nous avons eu beaucoup de problèmes au niveau de notre ministère de tutelle qui a trainé les pas avant d’accepter le principe. Même après avoir accepté le principe de créer la mutuelle, le Ministère en charge de la culture n’a contribué qu’avec une goutte d’eau pour alimenter le fonds de cette mutuelle. Pour vous parler franchement, le ministère n’a pas été très enthousiaste pour la création de cette mutuelle. Il y a mis le bout du doigt pour juste se dédouaner.Mais on n’a senti aucun engagement. La preuve est que jusqu’à présent si vous allez à la recherche de ces responsables actuels de la mutuelle, ils vous diront certainement leur déception. Il faut situer les responsabilités. Mais là, je dis que le ministère de la Culture n’a pas joué son rôle », a déclaré RASO tout frustré et remonté.

Selon toujours le doyen des comédiens, le plus gros problème de la mutuelle se trouve au niveau des artistes du Burkina. » J’ai participé à la création de cette mutuelle, il n’y a pas eu une adhésion ; on n’a pas senti la nécessité de se mobiliser, de porter cette structure. Finalement ceux qui l’on conçue avaient l’impression qu’ils le font pour eux-mêmes », ajoute Rasmané

Et le Secrétaire Général de la Confédération Nationale de la Culture (CNC), Samandoulgou Inoussa/ Figth Lion de confirmer :

Inoussa SAMANDOULGOU/ FIGHT LION

 » Ce ne sont pas les initiatives qui ont manqué, ce n’est pas l’énergie qui a manqué, ce ne sont pas des solutions qui ont manqué. Je peux dire que ce qui a manqué beaucoup plus, c’est ‘’ la volonté politique’’. La volonté politique n’a pas accompagné la dynamique. Un des ministres de la Culture m’avait lâché ceci : « J’ai l’impression que la question de la mutuelle de santé n’est pas la chose la plus partagée par tous les acteurs ».

« Nous avons été bloqués à certain moment pour la simple raison que nous portons un projet pour lequel nous ne sentons pas les politiques de la culture, ni un certain nombre d’acteurs à même de pouvoir soutenir le projet », souligne Inoussa Samandoulgou / Figth Lion

Pour le Président de la FNATB,  « C’est le problème de statut de l’artiste qui pose problème. A partir du moment où c’est un métier, un nombre de préalables devraient exister mais qui, malheureusement n’existent pas encore dans notre pays. Le seul dispositif qui existe aujourd’hui pour la retraite d’un artiste, c’est « Les assurés volontaires ». Mais cela ne prend pas en charge sa santé mais ces vieux jours » ».

Paul ZOUNGRANA : Président de la Fédération Nationale du Théâtre au Burkina (FNATB)

Bien que cet échantillon ne soit pas assez représentatif du milieu artistique, nous pouvons prendre le risque de parier que la solidarité n’est pas top et qu’une prévoyance sociale même si elle existait serait balbutiante et peu opérationnelle

Or, une véritable concertation entre les acteurs culturels est nécessaire quand on sait aujourd’hui que le revenu annuel moyen d’un artiste Burkinabè (Droits d’auteurs et spectacles compris) serait autour d’un million cinq cent (1 500 000 frs) environ soit cent vingt-cinq mille ( 125 000)  FCFA par mois. C’est l’équivalent de 191 Euros /mois. Il est plus qu’urgent que les artistes toutes filières confondues s’accordent sur l’essentiel et qu’ils réfléchissent sur une éventuelle mutuelle de santé, comme solution à la précarité financière dont ils sont victimes pendant et après leurs années de gloire. Ce qui ne doit pas dédouaner  le Ministère de la Culture et du Tourisme qui doit travailler davantage à protéger les créateurs de la pauvreté ambiante et à être le garant de la mutuelle pour éviter que l’artiste, après ses années de gloire ne descende au calvaire.

Enfin, pourquoi ne pas calquer positivement la Côte d’Ivoire où une mesure gouvernementale a fait des artistes vétérans des salariés ?

Joseph Stéphanie OUATTARA

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