Culture : La Chefferie à Tampouy-yarcé avec Salfo SORE/Jah Press

Culture : La Chefferie à Tampouy-yarcé avec Salfo SORE/Jah Press

Depuis 2019, les trophées de la musique au Burkina Faso très connus sous le nom « Kundé » a observé une pause. La raison ne surprend plus, Covid-19 oblige ! A la faveur des mesures d’allègement des mesures barrières instaurées depuis la pandémie, il se murmure dans les coulisses que les organisateurs du Kundé, l’un des évènements prestigieux d’Afrique et le plus attendu surtout des burkinabè s’activent pour le remettre en orbite. Ils époussettent, nettoient, soufflent, revernissent et rangent les plats les plus petits dans les grands afin de célébrer les 20 ans du Kundé. Sous quel format se présenteront ces noces du Kundé ? Le Commissaire Général du Kundé, Salfo SORE/ Jah Press se veut rassurant. Mais avant, il nous entretient sur ses nouvelles responsabilités de Chef traditionnel de Tampouy YARCE et ce, depuis 21 Mai 2021. Le nouveau Chef de Tampouy-yarcé  qui a pris le  titre de « Naaba Têg-ré »  souhaite faire mieux que son défunt père. Lisez plutôt !!!

ArtistesBF (ArtBF) : Bonjour et Félicitations tout d’abord pour votre intronisation comme chef coutumier de Tampouy- Yarcé. C’est un acte de confiance à la fois un mérite. Finalement, par quel titre devrions-nous maintenant vous appeler ? Monsieur le Commissaire Général ou sa Majesté « Naaba Têg-ré » ?

Jah Press : C’est un héritage et non un mérite. Ou vous assumez vos responsabilités ou vous ne les assumez pas. A  53 ans et tel que vous me connaissez, ai-je encore l’air de quelqu’un qui peut fuir ses responsabilités ? En tous les cas, je dis toujours que c’est un combat personnel.

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ArtBF :  – Chef coutumier de Tampouy- Yarcé  depuis le 21 Mai 2021, quel a été le premier acte coutumier majeur que vous avez  posé après votre intronisation ?

©Salfo SORE/Jah Press, par le jeu de la succession de la chefferie de père en fils devient « Naaba Têg-ré » de Tampouy YARCE

Jah Press : (Un peu embarrassé par la question). Non …. Acte Majeur en tant que tel ….. Il faut situer les choses dans leur contexte. D’abord, je préfère que nous parlions plutôt de chefferie traditionnelle que  coutumière. Chez nous à Tampouy Yarcé, la chefferie est basée sur la religion. Nous sommes des Yarcés. C’est nous (notre descendance) qui avons introduit l’Islam en Haute Volta, Burkina Faso aujourd’hui. Je vous réfère à l’histoire des Yarcés pour mieux comprendre. Nous ne connaissons donc pas de sacrifices de poulets ou autres bêtes à immoler. Tout est fait selon les rites musulmans.

ArtBF :  – Etiez-vous vraiment obligé d’accepter cette intronisation ? Sinon quelle devrait être la sanction si vous vous étiez opposé ?

Jah Press : C’est de père en fils. Normalement lorsque vous êtes le fils aîné du Chef,  le trône vous revient plus ou moins de plein droit. Mais pour vous répondre, on peut toujours refuser. Alors, je vous fais une confidence. Je mène depuis longtemps de petits combats personnels notamment  l’image que les burkinabè de l’intérieur ont coutume  de coller à leurs frères  résidant en côte d’ivoire et autres. Il s’agit du terme « DIASPO ». Voilà une appellation qui me chiffonne un peu. Être « DIASPO » pour moi, c’est quand on est hors du pays. Mais dès lors qu’on rentre et qu’on réside au pays, on est burkinabè au même titre que tout le monde. C’est pour toutes ces raisons que vous remarquerez que je ne milite dans aucun mouvement dit « DIASPO ». Je trouve qu’en nous considérant de la sorte, nous nous marginalisons par rapport aux autres.  Plutôt donc que de continuer à se marginaliser, il faut s’intégrer et se fondre dans la masse.

Mon second combat, c ‘est montré aux gens qu’on peut concilier le SHOW BIZ et les salons ou  bureaux feutrés  sans être déconnectés des traditions ou de ses origines. Nous pouvons faire comme les chinois ; c’est-à-dire, avoir la tête dans la modernité et  les pieds dans la tradition. Être Commissaire Général du Kundé ne veut  pas dire que nous tournons le dos à la tradition ou que nous ne sommes pas liés à notre tradition. Ma position aujourd’hui de chef de Tampouy-Yarcé, est de montrer entre  autres aux gens qu’on peut avoir vécu ou né hors du Burkina tout en étant solidement  lié à ses racines et à son village.

ArtBF : Mon Commissaire Général, vos casquettes deviennent un peu trop ! Commissaire Général par ci, partenaire de Nescafé ou NESTLE par là, chef de village plus loin et nous en oublions certaines…. Serez-vous finalement efficace ?  Et quel temps accordez-vous à votre famille?

Jah Press :(Sourire). Quoi qu’on dise, il faut bien qu’on vive ! Les activités que je mène avant d’être Chef me permettent de vivre et être utile à ma communauté. Le fait d’être chef n’entrave rien à mes activités ; je crois que tout est une question d’organisation.Aujourd’hui,  le système de la chefferie traditionnelle a beaucoup évolué. Nous avons des conseillers et des personnes ressources qui gèrent les affaires courantes. Quand il s’agira maintenant de prendre de grandes décisions,  on est là.

ArtBF :  – La chefferie coutumière rime avec Tolérance, patience et calme. Or vous êtes connu pour votre tempérament chaud et de quelqu’un qui ne se laisse pas faire. … Avez-vous déjà pris quelques cours sur la tolérance ou sur le calme avant d’accepter le bonnet ?

Jah Press : C’est une question d’environnement. L’environnement même du village amène les gens à être sage. Le tempérament que vous m’attribué relève du cadre de mon travail parce que je suis un perfectionniste et j’aime que les choses soient bien faites à temps et au bon moment.

ArtBF : Mais c’est aussi un aspect important qu’a besoin un village pour se développer

Oui ! mais au village, les gens ne sont pas pressés. En tous cas, pas comme en ville. Donc,si vous êtes dans ce milieu, vous devrez vous accommoder avec les populations et apprendre à aller à leur rythme. C’est toute une école. A 53 ans, je ne suis plus le même fougueux que vous avez connu il y a une quarantaine d’années.

ArtBF :  – De prime abord, quel projet de développement avez-vous déjà à l’esprit pour Tampouy-Yarcé. Opération d’établissement CNI-B ou actes d’état civil ?

Jah Press : Les projets, j’en ai déjà réalisés! Et ceux qui sont venus au village ont pu voir les petites réalisations que j’ai faites. Dans la mesure du possible,je continuerai de voir en fonction de mes moyens quelle contribution apporter à mon village. Mais les besoins sont connus. Ce sont les forages, les actes de naissance, la construction de barrages. Chaque chef durant son règne souhaite réaliser de grandes choses pour sa communauté. Masi à l’impossible, nul n’est tenu ! on fera ce qu’on pourra dans l’intérêt de la communauté villageoise.

ArtBF : Voulez-vous dire que vous ferez mieux que votre défunt père ?

Jah Press : Ah oui ! C’est le minimum parce que mon père n’était pas dans les mêmes conditions que moi. Et  même pour sa mémoire, il faut que je fasse mieux que lui. On dit chez nous qu’un enfant doit faire mieux que son père.

Propos recueillis par Gisèle Bélem et Patrick COULIDATY

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