La situation nutritionnelle au Burkina Faso

La situation nutritionnelle au Burkina Faso

La nutrition est un pan important dans chaque pays. La situation nutritionnelle un indicateur de développement. Au Burkina Faso, elle n’est pas très reluisante. Elle s’est notamment détériorée avec la situation sécuritaire difficile. Dieudonné LANKOUANDE, Coordonnateur national du Réseau de la société civile pour la nutrition (RESONUT), nous en dit plus.

Dieudonné LANKOUANDE, Coordonnateur national du RESONUT.

Artistes.bf (Art.BF) : Aujourd’hui, quel est l’état des lieux de la nutrition au Burkina Faso ?

Dieudonné LANKOUANDE (DL) :La situation nutritionnelle au Burkina n’est pas reluisante, même-si beaucoup d’efforts ont été faits ces dernières années. La tendance a, certes, baissé ces dernières années au regard des différents efforts des uns et des autres, mais cela ne fait pas du Burkina un pays dans lequel on peut dire que la situation nutritionnelle est bonne. A titre indicatif, la dernière enquête nationale sur la question en 2022 indique, que nous sommes à 9,7% pour la malnutrition aigüe globale, 21,6% pour la malnutrition chronique (données de 2021), et 17,5% pour l’insuffisance pondérale. Quand on regarde les valeurs ciblées dans le plan stratégique de la nutrition au Burkina, il vise à ramener le taux de la malnutrition aigüe globale à moins de 5% à l’horizon 2024 et la malnutrition chronique à 20%. Nous voyons que l’écart est grand. A l’horizon 2029, l’objectif est de 15% pour la malnutrition chronique et toujours moins de 5% pour la malnutrition aigüe globale.

Dans l’évolution de ces dernières années, on constate qu’à partir de 2015, il y a un regain de la malnutrition ; et la situation sécuritaire peut expliquer cela. Mais on peut noter une amélioration dans le plan de la gouvernance en matière de nutrition, dans la mesure où le Burkina et d’autres pays font de la multisectorialité pour la nutrition, une lutte commune. Désormais, on ne voit plus en effet la nutrition comme un secteur à part où il faut mener des actions de lutte pour ce secteur uniquement, mais on prend en compte les autres secteurs qui sont des secteurs contributeurs. Ainsi donc, l’encrage de la nutrition a été relevé au niveau de la présidence du Faso pour permettre qu’on puisse fédérer les énergies des autres secteurs ministériels. A l’époque où la nutrition dépendait spécifiquement du secteur de la santé, naturellement, c’est le ministère de la santé qui coordonnait l’ensemble des activités en lien avec la nutrition. Donc, par décret en conseil des ministres le 14 juillet 2021 au niveau du pays, nous avons pu relever l’ancrage de la nutrition.



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Au niveau du financement également il y a des efforts à noter. Notre pays était à 1% du budget global de l’Etat pour le financement de la nutrition. Au mois de décembre, ce pourcentage es passé à 1,72% ; cela fait que le tau visé pour 2023 était de 3%. Mais nous pensons qu’au regard de tout ce que nous vivons dans ce pays, atteindre 1,72% est un pas important.

En ce qui concerne l’intervention financière des partenaires techniques et financiers, au niveau du RESONUT, nous avons fait une évaluation sur la période de 2016 à 2018 (derrière évaluation en date). Les chiffres montrent que de manière globale, le financement de la nutrition au Burkina, les partenaires techniques et financiers contribuent à hauteur de 83,75%. Cela montre effectivement qu’il y a des efforts qui sont faits sur le terrain.

Art.BF : Quel est la tranche d’âge concernée par les problèmes de nutrition au Burkina Faso ?

(DL) : Les problèmes de nutrition au Burkina Faso prennent en compte toute la population de manière générale. Mais certains groupes sont plus vulnérables que d’autres. Les cibles les plus visées dans les interventions au Burkina sont les enfants de 0 à 5 ans, les femmes enceintes et les femmes allaitantes ; si elles ne sont pas biens nourries, cela peut être dangereux pour elles et leurs bébés.



 Art.BF : Quelles sont les opportunités de partenariat ou de financement pour les ONG et associations humanitaires dans la lutte pour endiguer la malnutrition ?

(DL) :Le mécanisme de financement jusque-là n’est pas traditionnel, mais il est tout comme. Il vient essentiellement de donateurs, de fondations et de l’Etat. En tant que RESONUT, nos pensons qu’il est mieux indiqué que notre Etat s’engage véritablement dans le financement pour la nutrition. Nous pensons qu’il n’est pas positif de dépendre de l’extérieur pour des questions de nutrition que nous pensons être des questions de souveraineté, des questions régaliennes qui doivent revenir en priorité à l’Etat.  Pour cela, au niveau de notre réseau, nous sommes en train de prospecter pour la contribution des collectivités qui ont aussi des budgets.  Récemment, nous avons fait un rapport sur l’apport des collectivités pour la nutrition, et le résultat est que, clairement, au niveau des communes, il n’y a que l’appuis des organisations internationales et nationales pour la nutrition. Les fonds propres des collectivités ne prévoient pas de parts réservées à la nutrition. Nous pensons que pour vaincre la malnutrition, le financement pour la nutrition doit être supporté en grande part par l’Etat.

Art.BF : Auriez-vous un dernier mot ?

(DL) :Je dirais que la question de la nutrition n’est pas une simple question de santé, c’est un indice de développement. Une étude de l’UNICEF révélait tantôt que le Burkina Faso perd plus de 180 millions de dollars par an dans la perte de la production liée à la malnutrition, et aussi dans la prise en charge de la malnutrition. Cela fait beaucoup de fonds perdus parce que les populations sont malnutries. Des fonds qui pouvaient servir pour d’autres activités. Alors nous lançons un appel à tous les acteurs : nous devons redoubler d’efforts ; car ce qui est déjà fait sur le terrain est énorme. Nous demandons à l’Etat d’en faire beaucoup plus en terme de financement dans le secteur de la nutrition, afin que nous puissions avoir une population bien portante pour pouvoir produire.

W. Kevine Elodie ZABA.

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