Alain HEMA / Marc, comédien

Alain HEMA / Marc, comédien

Artistebf (Art) : HEMA , merci de nous avoir reçus. A travers le questionnaire, nous remarquons que vous êtes à la fois metteur en scène et comédien. Mais avant tout propos, pouvez-vous vous présenter à nos internautes ?
Alain HEMA ( A.H ) : Je m’appelle Alain HEMA , enseignant de formation. J’ai servi au secondaire pendant quelques années à Bobo Dioulasso et à Dédougou avant de sortir diplômé de l’école de théâtre comme comédien et metteur en scène. C’est à partir de là, que j’ai intégré la première compagnie professionnelle de théâtre du Burkina Faso : la compagnie FEREEN.. A la création de la compagnie le 23 Octobre 1990, nous étions trois dont Amadou BOUROU, Odile SANKARA et moi-même. J’ai travaillé cinq ans avec Amadou BOUROU avant de créer ma propre compagnie professionnelle en 1995: « la compagnie éclaire », deuxième compagnie de théâtre en ce temps au Burkina. La première représentation était une mise en scène de Ildevert MEDA. Ensuite, vinrent mes propres créations inspirées de contes. Enfin, il y eut la structure CITO (Carrefour International du Théâtre de Ouaga ) dans lequel je suis membre fondateur. Dans cette structure, nous étions cinq encore au départ dont principalement Ildevert MEDA, Aminata DIALLO GLEZ Eric ZONGO, SAWADOGO Issiaka et moi-même. Aujourd’hui, l’espace CITO qui bénéficie du soutien de la Norvège compte près de trois cent membres.

Art : Qu’est-ce que le théâtre et combien de genre de théâtre existe – t – il ?
A .H : 
 Le théâtre de façon simple, c’est la démarche d’un spectacle ou d’une représentation par un comédien qui porte un texte .Au Burkina Faso, Prosper KOMPAORE a été celui qui a inventé ou du moins qui a amené le théâtre forum qui existait déjà au Brésil avec Augustin BOAD. Et le Théâtre forum c’est quoi ? C’est une représentation dans laquelle un message est dit de sorte que le spectateur devienne acteur à un moment donné. C’est la même démarche adoptée par le théâtre de la fraternité. Jean Pierre GUINGANE, directeur du Théâtre de la Fraternité a fait ce qu’il appelait le Théâtre d’intervention sociale. Il s’agit simplement de porter un texte qui permet à la population de réfléchir sur un thème donné afin d’engager des débats. A cela, il faut ajouter le théâtre d’auteur, la comédie musicale et l’opéra que j’ai expérimenté ici.

Art : Combien de pièces théâtrales avez-vous publiées ou mises en scène à cette date ?
A .H :
Je ne saurais vous le dire. ! Mais récemment, je viens de présenter les spectacles suivants :

« MEMOIRES », que j’ai présenté au CITO. C’est est un texte sur les résistances africaines,

« KOUMA KOURA » qui est une comédie musicale,

J’ai aussi présenté un spectacle en Belgique qui regroupait des Français, des Burkinabé et des Belges,

les « CHAUSSURES DU ROI MAKOKO » qui était en tournée en Belgique,

enfin, « L ’ ARBRE… », un spectacle présenté au mois de novembre


Art : Mr HEMA, contrairement à vos collègues, vous confirmez sur le formulaire que vous vivez bien de votre art ! Pouvez-vous nous partager votre expérience ?
A. H :
Moi je dirai tout simplement, qu’il n’y a pas ce Burkinabé quel que soit son métier, infirmier, policier, gendarme ou vétérinaire qui pourrait dire qu’il vit tranquillement de son travail. C’est tout ! C’est ça la question réelle ! En ce qui me concerne, je ne fais aucun autre travail que le théâtre, cela me fait vingt ans de métier. Maintenant, du fait que nous exerçons une fonction libérale et que nous ne bénéficions pas de retraite comme le fonctionnaire de la fonction publique, il
faut que ce métier soit fortement payé. La plainte des comédiens de dire que les réalisateurs ne nous paient pas énormément, c’est vrai à quelque part ! et on ne peut pas démontrer que cet état de fait est lié au manque de moyens dans la mesure où, après les films, de façon visible, les réalisateurs sont beaucoup plus riches que nous comédiens. Moi je crois que le combat ne se situe pas au niveau des réalisateurs mais surtout au niveau des comédiens mêmes. C’est trop facile de jeter l’anathème sur ces réalisateurs qui ne nous paient pas bien ; mais s’ils ne paient pas bien, tu ne joues pas ! Je crois que la réflexion doit être menée à notre niveau, se constituer en une véritable force de frappe à telle enseigne que les réalisateurs ne puissent se passer de nous !. A partir de là, nous exigeons un minimum de quota d’où la question du statut de l’artiste qui se pose aujourd’hui.
C’est vrai qu’il existe des structures comme l’Association Burkinabé des Comédiens du Cinéma (ABCCI ), mais, aucun dispositif n’est fait pour cadrer les comédiens. On attend à chaque FESPACO pour nous dire qu’il y a des badges pour voir des films. Point barre ! Il y a le syndicat de comédiens présidé par RASO, qui est non seulement comédien mais aussi fonctionnaire de l’Etat. Pensez-vous que ce dernier a les mêmes préoccupations qu’un comédien qui ne vit que du théâtre ? Non ! Raso, dans tous les cas, dans sa position actuelle, n’a rien à perdre. Qu’il y ait film ou pas, à chaque fin de mois, il est devant la BICIA-B ou la BIB. Moi je n’ai pas cette occasion. Donc, Raso ne peut pas défendre mes intérêts ! Moi j’aime bien Raso ! je n’ai rien contre RASO. Mais j’ose dire à Raso, qu’il ne peut pas être président du Syndicat dans sa position actuelle ( PCA du FESPACO avec tous les avantages qu’il y a derrière tout ça) parce qu’il est loin de vivre mes réalités, parce que nous ne parlons pas le même langage !. Il faut qu’on s’organise sinon nous allons toujours crever ! C’est vrai, on peut bien vivre de son art si on le fait correctement, si on est bien structuré.

Art : Comment voyez-vous l’avenir du théâtre au Burkina avec des salles de moins en moins fréquentées du fait de la multiplicité des espaces culturels et d’un public de plus en plus intéressé par le numérique ?
A. H:  
 L’avenir du théâtre est radieux d’autant plus que vous dites que les salles se multiplient. Si les salles sont multipliées, c’est parce que ça va très bien . Il nous appartient en tant qu’homme de théâtre de pouvoir inventer, créer et fidéliser le public . Sinon, personne ne le fera à notre place. En Europe, les salles de spectacle et de compagnie se comptent par millier. En ce moment, le festival d’Abidjan par exemple, fait environ cent représentations par jour et ça tient !

Art : Quelles sont vos sources de financement en ces périodes de récession économiques ?
A. H :
C’est difficile de vous répondre en tant que HEMA de la Compagnie Théâtre éclaire. Ce n’est pas la mesure générale. Tout dépend du type de théâtre. Il peut s’agir d’une mise en scène de sensibilisation, une oeuvre de commande d’une association ou d’une ONG. En ce moment, l’accent est mis sur le message et ce sont ces structures qui font le financement. Dans le cas d’un théâtre d’esthétique où le message est secondaire, le financement suit le circuit classique. Au Burkina Faso, à ma connaissance, il n’y a pas de ligne budgétaire prévue à cet effet. Le CITO par exemple avait été inscrit depuis quelques temps dans la ligne budgétaire du ministère de la Culture à hauteur d’un million de francs CFA. Malheureusement, depuis deux ans, nous n’en recevons plus ! . Présentement, toutes les créations du CITO sont soutenues par les ambassades des Pays Bas, de la France et d’Allemagne.

Art : Un dernier mot ?
A .H :
Un dernier mot ? Nous vous remercions d’avoir pensé à mettre quelque chose en ligne afin de nous rendre plus visibles et connus. Mais il nous appartient de faire du théâtre de qualité qui exige un travail individuel de la part de chaque comédien.
Artistebf, juillet 2009

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