Boundi Rachelle Marie COULIDIATY

Boundi Rachelle Marie COULIDIATY

Boundi Rachelle Marie COULIDIATY est native de Diapaga dans la Province de la Tapoa. N’eut été la civilisation, c’est une grande figure que la communauté YARCE (population vivant au Nord du Burkina) devait vénérée en rampant sur les coudes et en les martelant contre le sol en signe de respect. Malgré tout, rien n’enlève en cette fille son titre de noblesse. Elle est comédienne-conteuse et Présidente de la cellule Genre du Carrefour International du Théâtre de Ouagadougou. Pour contribuer au développement socio-culturel de son village, Rachelle COULIDIATY a décidé d’apporter sa touche en créant un FESTIVAL dénommé “DIAPAGA LA BELLE “. Nous l’avons rencontrée cette semaine pour échanger sur le métier de comédien et sur le théâtre en général. Voici donc Boundi Rachelle COULIDIATY, notre invitée de la semaine :

Boundi Rachelle Marie COULIDIATY (BRMC ) : Je me nomme Boundi Rachelle Marie Louise COULIDIATI, artiste comédienne conteuse et directrice du festival “DIAPAGA LA BELLE”. Je suis également la présidente de la cellule genre du CITO.
J’ai choisi le métier de comédien parce que c’est ce métier que je pense pouvoir exercer le mieux. Pour cela, mon premier réflexe était d’abord de me former. Choisir d’être comédien ne veut pas dire que j’ai échoué à l’école. Au contraire, je conseille à ceux qui veulent venir au théâtre de se cultiver parce qu’il n’y a pas d’idiots ni de médiocres au théâtre.
Artistebf : (ART .) : Vous semblez bien apprécier le tissu local qu’est le faso dan fani. C’est un plaisir ou une habitude qui s’est installée ?
BRMC : Je me retrouve vraiment dans le Faso Dan fani. Je sens que je suis encore utile pour mon pays parce que si j’achète un pagne tissé, je fais vivre une famille et c’est ma contribution comme ça. Je sais que si je fais coudre ce tissu par un tailleur burkinabé, je fais vivre un couturier et à travers ce couturier, une famille. Contribuer au développement de son pays n’est pas seulement le fait d’offrir du matériel. S’habiller en faso dan fani, c’est aussi participer au développement de son pays en encourageant notamment la production locale.
ART . : Est-ce que tout va bien pour vous au théâtre ?
BRMC : Malheureusement, vous savez que là où il y a des humains, il y a aussi des défauts et des comportements. Il y a un peu d’hypocrisie qui s’installe dans le milieu du théâtre. Au cinéma, je peux dire que les choses vont mieux. Mais pour le théâtre, il faut être ouvert entre vous pour pouvoir travailler ensemble sur une création. Il faut être clair entre vous pour pouvoir donner le meilleur de vous-même.
ART . : Que voulez-vous dire exactement ?
BRMC : Ne vient pas dans une création qui veut ! Il faut avoir quelqu’un, (un parrain si vous voulez) ou être recommandé pour être accepté dans une création. C’est un cercle d’amis et dans ce cercle que tout se joue. Mais je suis convaincue d’une chose. Même sans parrain, je sais que je peux m’imposer par mon travail ; c’est ce que j’essaie de faire jusque-là. Quand on se donne à fond et avec un peu de talent, on répondra toujours présent au rendez-vous de l’excellence et du bien-être.
ART . :Pensez-vous que cela ait un impact sur le théâtre au Burkina ?
BRMC :Je me dis que le théâtre avance, mais ce sont les hommes du théâtre qui n’avancent pas. Il y a des bons comédiens qui sont à l’ombre parce que tout simplement, ils n’ont pas eu la chance de monter sur scène ou d’être dans de grandes créations. C’est dommage ! Heureusement qu’il existe encore des metteurs en scène qui sont au-dessus de toute cette mêlée. Je profite de passage leur dire merci et je leur tire mon chapeau parce que grâce à eux, des citoyens lambda vont connaître le théâtre.
ART . : Les comédiens, est-ce que c’est le reluisant ?
BRMC :Honnêtement, on jouait juste pour le plaisir et pour l’amour pour ce métier. Je vis de ce métier, je nourris ma famille avec ce que je gagne. J’arrive à honorer mes charges : scolarité de mon fils, loyer, électricité, eau etc..
ART . : On dit pourtant que vos cachets sont à plaindre.
BRMC : Je ne vous cacherai rien. Il n’y a pas longtemps j’ai travaillé avec Ildevert MEDA et Luca Fusi ; mais j’avoue que les cachets qu’ils m’ont proposés sont assez raisonnables. Le cachet que j’ai eu, il y a des fonctionnaires qui ne peuvent pas l’avoir même en cinq mois de travail. Le problème, c’est la régularité. On peut travailler trois mois et faire deux à trois mois de temps mort.
ART . :En plus de l’irrégularité et de la faiblesse des cachets, y a –t-il d’autres difficultés ?
BRMC : La grande difficulté, c’est pouvoir concilier ce métier et le foyer ; cela demande de l’organisation. Chez la femme, cette question se pose de manière plus cruciale. Malgré tout, la femme arrive à s’en sortir et je la trouve hyper chique dans ce domaine.
ART . :Est-ce pour cette raison que les artistes tardent à se marier ou ne veulent pas se marier ?
BRMC : Moi par exemple je ne suis pas mariée ; mais j’ai un fils que j’adore bien et c’est ma famille comme ça. J’ai des sœurs et des frères qui vivent avec moi. Dans la vie, Dieu n’a pas écrit que tout le monde doit forcément avoir un mari ou une femme. Pour moi, ce n’est pas la fin du monde si tu n’en as pas ; ce n’est pas une fin en soi. Ce n’est pas quelque chose qu’on peut acheter au marché. Si tu te maries, tant mieux, si tu ne te maries pas, ce n’est pas non plus la fin du monde.
ART . :Vous êtes Directrice du Festival “Diapaga La Belle”. Pouvez-vous nous expliquer le concept ?
BRMC : Je me rends chaque vacance au village. Je pars avec mon fils pour voir comment ça se passe là-bas et c’est l’occasion aussi pour mon fils de découvrir le village, ses réalités, ses habitudes et son train de vie. J’ai constaté que dans mon village, les choses ne bougent pas. Les jeunes sont là, au bord de la voie et à rêver à longueur de temps. Il n’y a pas de distraction, il n’y a rien. Pourtant, je sais que mes aînés, rentraient chaque vacance pour mener des activités vacancières (théâtre, bal et kermesse). Un mois durant, la ville était animée. Aujourd’hui, les jeunes ne veulent même plus rentrer au village, la solidarité a également foutu le camp. Chacun, dans son petit coin, observe, épie, surveille les faits et gestes de l’autre. Si vous voulez, “Diapaga la belle est une initiative que j’ai créé pour participer au développement socio-culturel de mon village. C’est vrai que je n’ai pas de millions pour donner aux gens de mon village, mais j’ai quand même mon talent de comédienne que je peux partager avec eux et c’est ce que j’ai essayé de faire.J’ai créé un festival qui va permettre de réunir les jeunes en attendant qu’il y ait des bonnes volontés pour nous accompagner. Pendant trois jours, le Centre Populaire des Loisirs (CPL)refusait chaque soir du monde.
ART . : Qu’est-ce que vous avez proposé concrètement au public ?
BRMC : Il y a eu des prestations dans quatre disciplines. Le conte, la musique, la danse et l’humour. Malheureusement, le temps était court pour monter une pièce de théâtre. Nous comptons annuellement rééditer ce festival
ART . : Comment avez-vous financé cette activité ?
BRMC : Honnêtement, je pense que j’ai travaillé sur deux spectacles. C’est avec ces petites économies que j’ai pu organiser ce festival ; sinon, je n’ai eu le soutien de personne. Mais je m’y attendais et je m’étais préparée en conséquence. C’est un sacrifice et Dieu seul sait ce que j’ai fait pour aller réveiller mon village.
ART . : Quelles solutions proposez-vous pour faire avancer le théâtre au Burkina ?
BRMC : Je vais d’abord commencer par les journalistes. Dans la plupart des pays, les grandes stars doivent leur renommée aux journalistes ; ce sont les journalistes qui font les Stars. A ce niveau, il faut que les journalistes s’impliquent davantage pour donner assez de visibilité de notre culture. Il faut qu’ils soient au parfum des choses ; qu’ils continuent d’accompagner la culture du début à la fin. Ensuite, il faudra que les artistes soient plus ouverts, plus solidaires. Quand un artiste a une création, que tout le monde s’active ; qu’on l’accompagne d’une manière ou d’une autre.Enfin ; il faut aussi que les autorités nous accompagnent, il faut qu’on nous prenne au sérieux.

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