FESPACO 2019 : Nadia El Fani, Réalisatrice, Présidente du jury documentaire

FESPACO 2019 : Nadia El Fani, Réalisatrice, Présidente du jury documentaire

Franco tunisienne, Nadia El Fani est réalisatrice depuis 1990 après avoir gravi bien des échelons des métiers du cinéma (Technicienne, assistante à la réalisation, productrice). C’est aux côtés de nombreux réalisateurs que El Fani a affûté ses armes pour la réalisation et pour la production audio-visuelle. A son actif, une maison de production (‘“yeux noirs movies”), plusieurs films dont principalement, un premier long métrage “Bédouine Acker” réalisé en 2002 et un autre intitulé “Même Pas mal” qui a remporté le grand prix catégorie documentaire au FESPACO 2013. C’est une professionnelle qui, véritablement n’est plus à présenter puisque c’est depuis 1995 qu’elle a pris goût au succès et aux honneurs à chaque édition du FESPACO; dans son propre pays, jamais elle n’a reçu autant de bonheur. Son succès, sa popularité et ses mérites, Nadia Ela Fani les doit en partie grâce au Burkina à travers notamment, le FESPACO. Même si aujourd’hui, la réalisatrice, Présidente du jury documentaire à la 26ème édition, déclare dans les colonnes de “Jeune Afrique”, ne plus vouloir revenir au FESPACO pour des raisons qui lui sont propres, le FESPACO reste tout de même, l’une des institutions qui lui a donné l’occasion en or massif de goûter au bonheur et au fruit du travail bien fait. Notre invitée ne l’oubliera certainement pas tout comme elle n’oubliera jamais cette fierté de présider le Jury documentaire de la cette 26 ème édition-cinquantenaire. Lisez plutôt !

Nadia EL FANI : “Malheureusement dans mon propre pays, je n’ai jamais été en compétition, je n’ai jamais été honorée d’un prix où d’être membre d’un jury “©ArtistesBF2019

Je m’appelle Nadia El Fani, je suis Franco-tunisienne et réalisatrice depuis 1990. Auparavant, j’étais Technicienne du cinéma, assistante à la réalisation. J’ai travaillé avec de nombreux réalisateurs et après, j’ai monté ma propre société de production en Tunisie qui s’appelle “yeux noirs movies”. J’ai commencé à faire des courts métrages et après j’ai fait mon premier long métrage en 2002 qui s’appelle “Bédouine Acker” sélectionné en compétition au FESPACO. Auparavant, tous mes autres courts métrages ont toujours été en compétition au FESPACO. Je viens ici depuis 1995 et par la suite j’ai aussi mes autres films documentaires qui ont été sélectionnés en compétition. En 2013, j’ai gagné le grand prix catégorie documentaire avec “Même pas mal”. Je suis très heureuse d’être ici pour le cinquantième anniversaire du FESPACO et d’être la présidente du jury documentaire. Je suis aussi très heureuse de retrouver cette grande famille du cinéma où j’ai de nombreux amis à Ouagadougou.

Des critères de sélection

Ecoutez ! c’est un peu une colle ce que vous me posez comme question, parce qu’on n’a pas encore arrêté nos critères et je ne sais pas si on a le droit d’en parler avant la publication du palmarès. Donc, c’est un peu compliqué de vous expliquer tout ça. Mais de toute façon, c’est évident que quand on juge un film, on essaye toujours de trouver une cohérence entre la forme et le fond. A partir de là, on peut privilégier des sujets sur les autres ou privilégier des formes plus que d’autres. On peut aussi décider que quelque chose qui est en direct avec le réel, à l’instar des films que j’aime faire qui sont les films de combats, des films militants ou alors des films explicatifs ou informatifs qui pèsent le “pour et le contre”. Ce qui est extraordinaire dans le documentaire, c’est qu’il y a une grande liberté où l’on peut mixer toutes ces choses et que parfois on peut trouver des perles comme dans le cinéma, comme il y en a aussi dans la fiction. Mais ce qui est extraordinaire dans le documentaire, bien sûr qu’on écrit des choses pour savoir ce qu’on veut aller filmer. Mais pendant le tournage on a aussi la surprise de ce qu’on filme. Après, on a la liberté de monter le documentaire d’une autre façon. On peut souvent se retrouver avec des documentaires très écrits qui ne sont pas forcément extraordinaires et des films qui partent en totale liberté et qui, au bout du compte sont des choses qui donnent des merveilles. On est assez ouvert comme jury, on a envie d’être surpris et de toute façon, je fais confiance au comité de sélection du FESPACO d’avoir choisi que de bons films et qu’on ait beaucoup de travail et de difficultés à choisir.

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De  l’organisation de la 26ème édition -cinquantenaire ?

Vous savez la chose dont on ne parle jamais, c’est l’organisation. Parce que la chose la plus importante, c’est qu’au final, on est heureux d’être là. Maintenant, j’ai 59 ans. Avant, j’étais tout le temps quelqu’un qui était en train de se battre pour des choses. Maintenant, je suis devenue diplomate comme vous le voyez dans mon discours et donc, je ne parlerai pas de l’organisation. Mais j’apprécie toujours la gentillesse des burkinabè, ça c’est quand même très important.

Oui ! On dit “qui aime bien, châtie bien !” Mais je vous assure qu’aujourd’hui ma préoccupation, c’est de faire que mon jury ait les meilleures conditions possibles et qu’on essaye de voir au maximum les films des cinéastes dans les conditions du cinéma; c’est-à-dire, dans les salles avec du public et on s’est battu pour ça. Même les films qu’on ne verra pas avec le public, on doit quand même pouvoir les visionner dans une salle, à la cinémathèque dans de belles conditions de projection. Pour moi, c’est la meilleure des choses qu’on puisse rendre comme hommage aux cinéastes qui ont tant de mal à faire des films. Toutefois, je laisse le soin à mes collègues cinéastes qui ne sont pas membres du jury ou présidents du jury de dire ce qu’ils ont à dire sur l’organisation.

” Malheureusement dans mon propre pays, je n’ai jamais été en compétition, ni honoré d’un prix”

Mon cœur bat avec le FESPACO depuis très longtemps même si j’ai coutume de dire qu’à chaque fois qu’on arrive “on dit je ne reviendrais plus” et finalement passé le deuxième jour, on est tellement heureux d’être là, qu’on repart content d’avoir vu tout ce qu’on a vu, vécu tout ce qu’on a vécu. Et voilà … ! C’est pour répondre à votre question aussi sur l’organisation. C’est pour vous dire qu’on est toujours heureux d’être au FESPACO et moi particulièrement, parce que malheureusement dans mon propre pays, je n’ai jamais été en compétition,  je n’ai jamais été honorée d’un prix où d’être membre d’un jury quelconque alors qu’il y a beaucoup plus de festivals en Tunisie qu’ici. Je suis vraiment très heureuse que le FESPACO m’a toujours reconnue non seulement en tant que cinéaste, mais surtout en tant que cinéaste engagée.  Le FESPACO m’a toujours soutenue et je trouve que m’inviter comme présidente du jury pour le cinquantenaire, c’est vraiment me faire un honneur, que j’apprécie beaucoup.

En 50 ans de cinéma que peut-on retenir ?

Peut-être que là, il y a une chose que je pourrais dire comme critique par rapport au FESPACO, c’est la place qui est faite au cinéma des femmes. Je dis bien des femmes ! Et moi j’aime bien dire que les femmes sont des réalisateurs comme les autres, même si c’est une faute de français de le dire ainsi. Mais c’est pour dire que nous voulons la parité dans les commissions, dans les comités de sélection, dans les commissions d’aide pour que les femmes existent autant que les hommes parce que nous sommes la moitié de l’humanité. Et il n’y a pas de raison que dans le cinéma, nous ne soyons pas la moitié des cinéastes représentés dans les festivals, dans les palmarès etc. Grosso modo, c’est un peu ce que je pourrais demander au FESPACO.

Dire maintenant si le cinéma en 50 ans a changer véritablement le visage de l’Afrique, c’est toujours très compliqué de répondre à cette question. Je pense que c’est très particulier au Burkina Faso, il y a un amour du cinéma du public et c’est pour ça que nous cinéastes aimons être là parce qu’on sent cette ferveur et que qu’elle est soutenue par le gouvernement. Ce qu’il faudrait surtout, c’est qu’il y ait d’autres gouvernements qui soutiennent le cinéma sur ce continent.  Evidement en tant que cinéaste engagée, je pense que par le cinéma, (parce qu’on ne peut conduire une révolution par le cinéma) on rentre dans l’imaginaire des gens. Et on peut faire en sorte qu’il regarde le monde d’aujourd’hui autrement et en ce sens-là,  je crois que les cinéastes africains ont toujours été très importants, des experts qui vont continuer  à se préoccuper de ce continent, de ce qui lui arrive, de la politique, de la société, des conditions des femmes, bref… tous les sujets sont importants et sont à même de changer les peuples et les aider à réfléchir sur leur avenir.

ArtistesBF

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