« La Côte d’Ivoire constitue une cible de choix pour les groupes armés »

« La Côte d’Ivoire constitue une cible de choix pour les groupes armés »

Eddie Guipié, chercheur à l’université de Korhogo, décrypte le modèle de cohabitation religieuse du pays et comment il est attaqué par une multitude d’actes isolés.

Le 11 juin, une dizaine de militaires ivoiriens ont été tués à un poste de sécurité non loin de la frontière avec le Burkina Faso. Cette attaque djihadiste, dont le chef a été capturé dimanche 21 juin, serait une réponse à l’opération antiterroriste conjointe ivoiro-burkinabée menée en mai des deux côtés de la frontière. Si l’armée ivoirienne avait affirmé à l’issue de l’opération « qu’aucune base terroriste n’existe sur le territoire ivoirien », il n’en demeure pas moins que le nord du pays est, depuis plusieurs années, en alerte.

Dans cette région, marquée par un important brassage religieux et communautaire, la porosité des frontières avec les voisins maliens et burkinabés, en guerre, fait craindre aux autorités ivoiriennes et à de nombreux observateurs une incursion armée ou idéologique d’organisations djihadistes, voire l’établissement d’un sanctuaire.

La Côte d’Ivoire échappe au cliché du pays coupé entre un Nord exclusivement musulman et un Sud uniquement chrétien. L’islam est la religion majoritaire dans le Nord, mais il cohabite avec une population chrétienne importante ainsi qu’avec des communautés qui pratiquent des rites traditionnels. Comment tient cet équilibre ?

Eddie Guipié Le nord de la Côte d’Ivoire est une grande mosaïque ethnique où se distinguent toutefois deux ensembles. D’une part, les populations mandées, qui comprennent les Malinké improprement appelés « Dioula », et d’autre part les Gour, anciennement appelées « Voltaïques », dont la communauté Sénoufo est le groupe le plus important, en termes démographiques, du nord de la Côte d’Ivoire. Et à l’intérieur de ces ensembles existe une myriade de populations.

Il faut reconnaître qu’entre ces communautés, un équilibre solide a longtemps prévalu. Il repose sur trois éléments. Premièrement, la pratique d’une langue commune, le dioula. Vient ensuite un islam qui, tout en prenant le pas depuis un siècle sur les rites traditionnels, ne les a pas pour autant chassés. Une certaine forme de syncrétisme est tolérée. Enfin, les alliances, ou « parenté à plaisanterie » [pratique ouest-africaine qui consiste en moqueries réciproques et permet aux populations de faire baisser les tensions et d’éviter le recours à la violence] ont pacifié les relations entre certaines populations et servent de liant entre elle.

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