Un village dans une ville, un concept de Oliva OUEDRAOGO

Un village dans une ville, un concept de Oliva OUEDRAOGO

Oliva Wend Kuni Ouédraogo, conteuse, comédienne et Présidente de l’association “cri d’espoir” est la promotrice du festival “un village dans une ville”. Nous l’avons rencontrée pour échanger autour de ce festival à travers notamment le bilan de la 9ème édition qui s’est tenue du 02 au 9 novembre 2019 à Ouagadougou.

Oliva OUEDRAOGO , Promotrice de “Un village dans une ville”

Je me nomme Ouedraogo wend kuni Oliva. Je suis comédienne conteuse, promotrice culturelle et présidente de l’Association “CRI D’ESPOIR”. C’est une association qui œuvre pour la valorisation de la culture burkinabè. Dans le contexte actuel où la tradition s’effrite progressivement au profit de la  modernité,  on essaye de mener des réflexions et de poser des actions à même  de redonner de la valeur ajoutée à notre tradition.

Contexte et justification du Festival

En tant que jeune, on s’est dit qu’il fallait passer à l’acte. Les gens ne cessent de dire qu’il faut valoriser la culture burkinabè. Mais en tant que jeune, on se pose toujours la question de savoir ce qu’est réellement la culture burkinabè ? Est-ce un chef coutumier qui passe avec un bonnet sur la tête ? Est-ce le fait de porter un habit traditionnel ou est-ce plutôt le fait de danser le folklore burkinabè ?

C’est autant de questionnements qui nous reviennent et qui pourraient aussi préoccuper d’autres citoyens. Alors, on s’est dit pourquoi ne pas créer une vitrine pour présenter pendant une semaine la culture burkinabé.

L’idée du festival

Ce festival que nous avons démarré en 2011 se poursuit sans interruption. Cette année, il s’est déroulé du 02 au 09 novembre 2019. L’idée était de représenter un village réel en ville comme le nom l’indique ” un village dans une ville“. Malheureusement depuis sa création, on n’a vraiment pas pu réaliser les représentations des villages à Ouaga pour diverses raisons notamment financières.

Les activités du festival

En plus du travail de reconstitution des villages qui devraient avoir lieu pendant le festival, d’autres activités connexes sont également prévues. Il s’agit de la lutte traditionnelle, les prestations de danses traditionnelles de Pabré et de Ziniaré.  Comme pays invités, il y avait la Côte d’Ivoire, le Bénin, le Mali, le Togo  et le Canada.

Le Festival “un village dans une ville” n’ayant pas essentiellement pour vocation de former, il faut plutôt de le voir comme un cadre d’expression, d’échanges et de brassage culturel. Toutefois, pour cette 9ème édition, nous avons choisi de mettre en valeur un instrument de musique traditionnel qu’on appelle le “ROUDGA”.

Le violon traditionnel ou le “ROUDGA”

C’est un violon traditionnel qui est en voie de disparition. Culturellement, le “ROUDGA”  a un langage codé que seuls les initiés peuvent comprendre et l’interpréter pour les autres. Nous l’avons inscrit au programme afin de le faire découvrir aux jeunes générations.

Le conte

Pendant le festival, nous avons aussi inscrit le conte en tant que discipline d’oralité pour conseiller les enfants. Le conte est très important parce que cela facilite leur manière de dialoguer. Avant on conseillait les enfants et les adultes par le conte.  On se disait les coups de gueule à travers les contes. Le conte permet aussi à l’enfant de retenir, de connaitre sa tradition.  On y raconte l’histoire de nos villages. Le conte permet de rassembler, car si tu veux parler, il faut que quelqu’un t’écoute. Les Temps de conte sont des moments où la cohésion sociale prend toute son ampleur puisque c’est du “donner et du recevoir”.

Pendant les moments de conte, nous invitons la fondation Lucie Kaboré qui s’occupe du bien être des veuves et des orphelins. Pour nous, c’était important de faire appel à ces genres d’institutions parce que cela permet d’insérer ces orphelins dans un autre milieu où ils se frotteront avec d’autres enfants. Et pendant ces moments-là, ils sont à l’aise, on ne reconnait ni orphelins ni  enfants pauvres ni enfants riches. C’est un moment qui efface les différences et les complexes.

Il faut dire que nous travaillons essentiellement avec les enfants parce que ce sont eux qui vont faire rêver notre monde. Et si nous on a envie que nos traditions soient pérennes, il faut les montrer aux enfants.

Le tissage

Comme autre activité, nous prévoyons aussi pendant le festival le tissage traditionnel. Nous initions les enfants au tissage et nous les familiarisons avec les outils de tissage.  L’enfant en une semaine sait comment on appelle les outils du tisserand, les chants qui accompagnent le tissage etc. Il pourra plus tard, (nous l’espérons) s’en inspirer. Comme on le dit, ça permet d’apporter la terre à la terre.  Les enfants et même certains parents étaient touchés de voir comment on faisait le tissage à la méthode ancienne.

Pour toutes ces personnes ressources gardiennes de nos traditions et pour lesquelles les enfants étaient fiers de découvrir leur savoir-faire traditionnel, sont des réels trésors vivants.  Ils méritent d’être encouragés et leur savoir-faire doit être valorisé par le Ministère de la culture parce qu’après eux, il n’y aura plus rien !

Le filage traditionnel.

Pour la circonstance, nous avons expressément fait appel à une canadienne conteuse et fileuse traditionnelle. L’objectif était de permettre aux femmes tisseuses burkinabè de voir comment leur travail se fait dans d’autres cultures. La canadienne file  en étant debout pendant  les autres le font en position assise.

C’était important de juxtaposer ces deux pans culturels et permettre à chacun de pouvoir apprécier. Ce sont des moments magiques où nous avons l’impression en tant promotrice d’avoir apporté quelque chose à la jeune génération.

L’art culinaire

L’art culinaire avait également sa place dans le programme.  Pour la présente édition, on s’est limité à la préparation du beurre de Karité à la manière traditionnelle. Nous avons initié les enfants (les filles surtout) au processus de fabrication du beurre de karité. Après avoir pilé et écrasé à la meule, elles ont appris à battre le beurre.

Quelles ont été vos difficultés ?

On a eu le soutien du Ministère de la culture à travers le Fonds de Développement Culturel et Touristique (FDCT) pour une valeur 3 300 000 FCFA. C’est très important de le souligner.

Le deuxième sponsor, c’est la compagnie “TCV” qui a permis aux festivaliers de l’Afrique de l’Ouest (Bénin, Cote d’Ivoire et le Mali) d’être au festival. Sans l’apport de ces partenaires, je ne pense qu’on aurait réussi. Donc à tous ces partenaires, je leur dis grand merci. Merci également à la Sofitex et FIRSA qui a mis à notre disposition du coton pour les ateliers d’initiation et des bandes de cotonnades pour la décoration.

En terme de difficultés financières, on se demande parfois, si c’est nous qui ne savons pas monter les projets ou ce sont nos projets qui sont pas pertinents ? On se pose toujours la question. Toutes nos correspondances adressées aux sponsors ont eu des réponses. Mais jamais nous n’avons reçu une quelconque aide financière. Et pourtant, il y a les opérateurs de téléphonies, les coopérations, les sociétés de boisson, les ambassades et beaucoup d’ONG; ce n’est pas simple ! Mais on n’est pas découragé et on continuera de déposer nos dossiers parce que comme l’indique le nom de notre association, c’est  “Cri d’Espoir”, on ne perd jamais espoir et on se dit que demain sera meilleur.

Quel bilan tirez-vous en 9 ans d’activités ; positif ou négatif ?

Le bilan est positif par rapport à la réalisation qu’on a pu faire. Mais négatif en fonction des barèmes qu’on s’est fixé car on a même pas atteint le quart de nos objectifs. Mais on se félicite car si au quart de nos objectifs les gens nous applaudissent, s’ils trouvent que les actions que l’on mène sont louables, on ne peut être que satisfait.

Pour terminer qu’est-ce que vous nous réservez pour 2020?

Pour 2020, on s’est fixé comme objectif d’aller rechercher dans les villages reculés  des troupes, des danseurs, des artistes, des gardiens de la tradition qui sont oubliés quelque part, qui n’ont jamais mis pied à Ouaga pour prester. Et nous souhaitons créer de nouveaux ateliers d’initiation sur la forge, la poterie, la vannerie etc. On veut également fêter nos 10 ans tout en espérant pouvoir construire notre village artificiel, c’est tout ce qu’on demande

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