Issaka SAWADOGO, promoteur du festival Séries-Series

Issaka SAWADOGO, promoteur du festival Séries-Series

L’idée est née à Fontainebleau lors d’une édition sur les séries télé. Invités lors  du Festival Pan Européen de Fontainebleau sur la série, deux réalisateurs burkinabè ont été séduits par le concept.  Issaka SAWADOGO et Omar DAGNON, (puisque c’est de ceux-là qu’il s’agit) ont murit l’idée de créer un festival similaire au Burkina Faso. Au moment où les salles de cinéma se ferment en Afrique et particulièrement au Burkina Faso, une telle idée pourrait être une véritable éclosion des séries africaines. Depuis lors, l’idée de lancer une série pan africain fait boule de neige et  continue de tarauder dans l’esprit du Bouillant Issaka SAWADOGO, comédien et porteur actuel du projet “SERIES SERIES”. 

Soutenu par le FESPACO, Casting COMMUNICATION de Georgette PARE et de partenaires européens, le festival s’annonce en grande pompe pour le 27 Février au 1er Mars 2018 à Ouagadougou. Déjà sur toutes les lèvres, SERIES SERIES promet d’être une rencontre balaise entre professionnels du cinéma. A quelques jours donc de la tenue de ce festival, nous avons rencontré le promoteur pour en savoir davantage. Mais avant, voici en quelques mots le portrait de  comédien.

Issaka SAWADOGO (I.S) : J’ai commencé par le théâtre mais  aujourd’hui, c’est le cinéma qui a pris le dessus. Je dirai que je suis  plus du cinéma  que du théâtre. J’ai commencé à jouer au théâtre en 1987 officiellement avec Jean Pierre Guingané dans une pièce d’intervention sociale “Papa oublie moi”. Depuis 1996, je n’ai fait que des premiers rôles en passant des pièces d’auteur burkinabé aux pièces classiques  européennes. Mais c’est en 2006 qu’officiellement ma carrière cinématographique a commencé  avec “exoticor”, un court métrage du réalisateur Belge Nicolas Provost. Ce court métrage depuis sa sortie m’a valu 5 prix du meilleur comédien.

ArtistesBF (ArtBF) : Une idée des films dans lesquels vous avez joué?

I.S : Dans les films burkinabés, j’ai joué dans :

  • “l’héritier” de Guy Robert Yaméogo,
  • “l’œil du cyclone”
  • “Foulard noir” et “Mogo puissant” d’Aboubacar Diallo,
  • “petit sergent “ d’Adama Rouamba

ArtBF : Quand nous lisons le projet, Il y a comme des activités doublons avec le  FESPACO.

I.S : Il n’y a pas de doublons parce que le cinéma et la série sont deux entités qui sont  complétement différentes. En fait, ils agissent différemment, c’est pour le même public mais c’est le canal qui diffère.

Le cinéma, c’est  le grand écran, mais quand on parle de télévision on parle de série. En Afrique de l’ouest, il n’y a aucun pays  africain qui dispose d’une bonne salle de cinéma. Toutes les salles de cinéma sont fermées. Pourquoi? Est-ce une politique des grandes chaines nationales de détruire les salles de ciné pour pouvoir s’imposer? Mystère!  La réalité, c’est qu’en Afrique de l’Ouest, il y a très peu de salles de cinéma et c’est la télévision qui les a remplacées dans les foyers. Avec le petit écran et très peu de budget, on peut faire des séries de 12 ou 15 épisodes et les vendre parce que les chaines ont besoin de séries pour pouvoir fonctionner. Quant aux grands films, il faut 5 ans minimum pour monter un scénario sans compter la production, les recherches de financement…  etc.

ArtBF : Revenons sur les activités telles que décrites dans votre projet. Les masters class, les conférences, les ateliers sont des activités déjà connues pendant le FESPACO ?

I.S : Non, ce n’est pas pareil ! En matière d’éducation, il n’est jamais assez. A n’importe quel moment ou à n’importe quel âge on peut toujours aller s’éduquer ou s’informer surtout en ce temps de boom technologique. Et il faut que nous soyons en phase avec l’évolution technologique.

Au Burkina, le problème du cinéma ou des séries n’est pas une question de financement. Le vrai problème, c’est le manque d’expérience et de formation. N’importe qui s’improvise réalisateur, scénariste, producteur et acteur  ou actrice. Du coup, on tombe des nues quand on regarde leurs œuvres. Évidemment, quand c’est médiocre comme ça, on ne peut s’empêcher de se poser la question de savoir d’où viennent ces réalisateurs et de quelle école viennent-ils ?

Au Burkina, sur 10 séries qui ont été tournées ces deux dernières années à Ouagadougou parlent de quoi ?  De Belle-mère, d’affaire de fesses, Affaires de copinage… C’est bien ! Il y a de l’énergie qui se dégage. Mais on n’en a rien à foutre de ça ! Il n’y a pas que ça à montrer ! Donc autant on se réjouit de voir ce dynamisme et cette volonté d’apprendre qui se dégage,  autant nous devons les accompagner dans la formation afin que leurs œuvres soient compétitives.   Il y a des investisseurs internationaux qui viennent piller l’or du Burkina, là, on ne dit rien !.

Je crois qu’il y a énormément  de sources d’inspiration dans ce pays. Malheureusement, comme les gens ne sont pas formés et qu’ils ne savent pas, ils se contentent du minimum qu’on leur offre. Et le minimum qu’on leur offre ce sont les télénovelas, des mauvais exemples que je ne regarde pas d’ailleurs. C’est  un abrutissement pour un comédien qui regarde ce genre de séries parce que c’est du n’importe quoi.

Les thèmes ne cadrent pas avec notre réalité et c’est ce qu’on bombarde à notre population. Tous les programmes des chaines TV5 et Canal Plus ont été faits pour l’Europe et  pour l’exotisme européen. Et pourtant,  elles nous les envoient. En Afrique et dans les ménages particulièrement, c’est la publicité européenne qui y est déversée et ce sont des milliards qui sont générés.

Mais comme on n’est pas formé, on n’est pas aguerri des tenants et des aboutissants en matière de droit, de publicité et de business, on ne connait pas ça. Il faut donc former des gens. Le nerf de la guerre n’est pas de donner des millions aux réalisateurs  qui ne savent pas réaliser, aux scénaristes  qui ne savent pas écrire des scénarios. Plutôt que de travailler, ils vont aller s’acheter des voitures ou se construire des villas. Au finish, c’est pour réaliser et présenter des faux trucs au public…

L’autre objectif  du festival, est nous organiser,  de combiner nos énergies et de partager nos expériences. C’est pourquoi nous l’avons placé sous le thème “Les états généraux des séries africaines”. C’est cela qui pourra nous amener à prendre conscience de là où  il faut frapper  pour pouvoir être compétitif.

L’idéal aurait été qu’au Burkina après 50 années de  FESPACO, on puisse dire :” voici une académie du cinéma  africain où on forme des acteurs de cinéma : scénaristes, cameramen”.. etc.

Petit à petit nous sommes en train d’avancer en jumelant nos forces. Le FESPACO va changer de visage, je vous assure parce que la nouvelle génération qui arrive est une génération TIC. Une génération “HIGH-TECH”. Leur vision du cinéma sera différente de leurs aînés.

ArtBF : Quels seront les critères de participation?

Georgette PARE et Issaka SAWADOGO, tous bien en forme

I.S : Nous allons travailler avec le festival “Série-Series” PAN EUROPEEN et le festival “Série-Series” FESPACO pour essayer de trouver quelque chose qui sied à tous, puisqu’on parle international et de compétitivité. Donc nous avons travaillé à faire en sorte que tous ceux qui voudront participer au festival soient dans les mêmes conditions. Cependant, les festivaliers étrangers vont payer leur billet d’avion et vont se loger à leurs frais. Pour les nationaux ce sont les mêmes critères d’accréditation. Mais nous sommes toujours en concertation pour  trouver la bonne formule afin de permettre une large participation.

ArtBF : Nous sommes déjà à quelques jours et les critères de participation ne sont pas encore au point?

I.S : Si !  Les accréditations sont  enregistrées en ligne et beaucoup ont même commencé à payer leur accréditation. Tous ceux qui ont envoyé leur film, environ  une centaine nous allons faire une sélection.  Une sélection sera faite et au niveau national, les accréditations vont commencer à sortir.

La date n’est pas une condition. La preuve, c’est que nous allons essayer de faire venir les précurseurs de la série burkinabé notamment Abdoulaye  Dao, Naraogo SAWADOGO, ce sont eux les premières personnes qui ont marqué les séries burkinabé.

ArtBF : Quel sera la place d’Abdoulaye Dao ?

I.S : Il va animer un atelier sur la réalisation et l’écriture du scénario, la production avec  Noraogo SAWADOGO. J’avais voulu aussi que Guy Désiré Yaméogo qu’on connait comme seul scénariste du Burkina participe, mais pour des raisons de calendrier il ne pourra pas. Ce n’est pas grave, il sera cité si jamais, il arrive à tout faire pour s’accrocher, on va le rencontrer pendant le festival. Abdoulaye Dao est un grand homme que je respecte beaucoup parce que celui-là, il a non seulement la connaissance, il a appris, il sait comment travailler en Afrique. Vis-à-vis était l’une des toutes premières séries et c’était autour d’une bière que le gouvernement l’a appelé pour lui dire de ne pas arrêter ce qu’ils ont commencé… Il va nous expliquer comment il est arrivé là. Quand on prend dans toute l’Afrique de l’ouest Francophone, il n’y a pas une série aujourd’hui qui bat “quand les éléphants se battent” en matière de qualité d’image et la façon de filmer, la réalisation, le jeu d’acteur, il n’y en a pas, c’est un repère.

ArtBF : Quel est le budget prévisionnel de ce festival ?

I.S : Nous avons un budget de 19 millions. Ça c’est le budget burkinabé, mais vraiment  un petit budget. Nos partenaires européens ont un budget d’environ 60 millions de francs CFA. Les deux budgets ensemble tournent autour de 170 à 200 millions. Mais à l’heure où nous sommes je peux dire  que les 50 pourcent du budget ont été acquis en matériel, support technique, logistique. Le FESPACO nous accorde son cadre, son local, ses projecteurs  qui valent 15 millions. Il y a des structures comme ça qui ont pris nos dossiers et qui ont dit bon, on ne peut pas vous donner de la liquidité mais on va vous donner ce que vous voulez  et c’est tout ce qu’on demande. Il y a aussi ceux qui vont nous donner de la liquidité  qui va nous permettre d’acheter les billets  et de combler les autres choses dont nous avons besoin. Il y a aussi l’OIF qui nous a accordé un financement  c’est la partie européenne mais c’est géré  par les deux pays, il y a aussi canal + qui a donné beaucoup d’argent, qui participe et qui va faire venir des gens, la garderie et TV5 pour faire diffuser des spots publicitaires  et il y a BF1 qui est notre sponsor officiel en média qui investit plus de 10. Des sponsors aussi comme la mairie qui va au-delà de 15 millions. Est que l’on peut dire qu’on n’est pas comblé? Et il y a vous aussi  qui relayez l’information.

ArtBF :  Un mot de fin ?

I.S : Je voulais lancer à l’intention du FESPACO, pour ce jeune festival panafricain de série qui est déjà né et les autres festivals qui sont des acquis du Burkina. C’est la culture qui a été le tremplin économique de ce pays quand on ne savait pas qu’il y avait de l’or. C’est la culture qui a fait connaitre ce pays. La culture est un investissement  fiable plus que l’or. La mine d’or est l’intelligence culturelle et la diversité  que les burkinabés ont. L’emplacement géographique par rapport  à l’Afrique de l’ouest et la capacité et le courage des burkinabé à être inventifs et créatifs on ne trouve pas cela ailleurs qu’au Burkina. Je pense que le cri de cœur que j’ai envie de faire c’est d’appeler tous les burkinabés à être conscients de cela et à ne pas attendre que le gouvernement lève le petit doigt mais qu’ils se mettent eux même en valeur  parce que nos valeurs culturelles vont au-delà de ce que le gouvernement peut faire. C’est le monde entier qui va apporter les financements pour que le Burkina sorte. Il faut des gens consciencieux au niveau du gouvernement pour se rendre compte qu’en fait, la culture n’est pas à banaliser. Ce que la culture rapporte à l’Etat burkinabè est près de 10 fois supérieures au budget de l’Etat. Je vais même loin pour dire que nous sommes une force politique et c’est peut-être cela qui fait peur aux politiciens.

Patrick COULIDIATY

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