Le cinéma est-il mort au Togo ?

Le Cinéma africain depuis la fermeture des guichets du Nord, traverse une crise sans précédent de son histoire. Avec la privatisation des salles de cinéma et l’avènement du numérique, les choses se sont davantage compliquées. Et comme si cela ne suffisait pas, les vidéo-clubs dans les quartiers populaires ont fini par vider les salles de cinéma de ce qui leur restait comme cinéphiles; le tableau est peu reluisant. Si dans certains pays le 7ème Art continue de faire le beau temps, il est par contre dans d’autres pays difficile de pointer du doigt une salle de cinéma digne de ce nom. C’est le cas par exemple au Togo où le cinéma se parlerait désormais au passé composé. A écouter notre invitée, on se demande si le cinéma n’est pas réellement mort au Togo.
En effet, ce n’est certainement pas le seul pays en Afrique à être dans une telle situation, mais déjà dans ce pays (Togo), il faut saluer le Cinéma Numérique Ambulant (CNA) qui se positionne comme une solution palliative à la crise.
Pour en parler, nous avons rencontré Juliette FOUNI AKOUVI, Présidente du Cinéma Numérique Ambulant au Togo. Quelles sont les attributions du CNA, son fonctionnement et ses activités sur le terrain, telles ont été les questions que nous avons abordées avec AKOUVI, notre invitée de la semaine.
De manager d’artiste au départ, notre invitée a animé plusieurs années dans les villages et quartiers du Togo avant d’être à la tête du CNA :


Je m’appelle Juliette FOUNI AKOUVI, je représente la structure “Cinéma Numérique Ambulant” (CNA) au Togo. J’ai été retenue suite à un test de recrutement par le CNA pour animer les débats dans les villages et dans les quartiers populaires autour des films africains susceptibles d’intéresser les populations. (…) Le CNA est un réseau d’association qui est présent dans 8 pays africains et en France. Son objectif est de

Nous nous servons du canal du cinéma pour faire passer nos messages de sensibilisation. Après quelques années d’animation, j’ai été nommée Présidente de l’Association.

Artistebf (Art.) : A quelle période se situent vos campagnes de sensibilisation ?
Juliette FOUNI AKOUVI (J.F.A).:Nous n’avons pas de période fixe. Nous le faisons occasionnellement, à travers des films de commande, des appels à projets et des besoins qui se font ressentir dans les villages ou dans les quartiers populaires du Togo.
Art : Les films projetés sont-ils exclusivement axés sur la sensibilisation ?
J.F.A : Pas forcément ! En fait, notre objectif même est de promouvoir le patrimoine culturel du Togo. Il y a deux choix: soit les réalisateurs nous apportent leurs films ou alors, c’est nous qui allons vers eux surtout quand le film est digne d’intérêt.

Art : Comment cette activité est-elle financée?
J.F.A : Ce réseau fonctionne à partir des fonds recueillis par le CNA-Afrique auprès des CNA des différents pays. Grâce à ces fonds, les réalisateurs des films jugés dignes d’intérêt et qui ont été retenus par le comité de sélection du CNA, sont rémunérés. Nous signons des contrats avec ces réalisateurs, nous convenons avec eux d’un pourcentage de rémunération afin de leur permettre de vivre de leur art.

Art : Cette activité répond-elle à la crise que traverse actuellement le cinéma au plan mondial?
J.F.A : Oui elle est une réponse au manque du cinéma et en Afrique en général. Au lieu donc que le public vienne vers le cinéma, c’est le CNA qui amène le cinéma vers les populations pour leur faire découvrir les films africains. Au Burkina, les gens ont encore de l’engouement pour le cinéma; mais au TOGO, la réalité est toute autre. Les togolais sont non seulement peu informés sur les nouveaux films africains mais du fait que la situation se dégrade de jour en jour, ils n’ont même plus cette culture d’aller dans les salles. Aujourd’hui, il n’existe plus de bonnes salles de cinéma au TOGO. La seule salle qui avait été réhabilitée pour le cinéma est devenue une simple salle de spectacle.
Le CNA veut donc inculquer cette culture cinématographique aux populations afin de les motiver à participer activement aux projections et de les associer aux débats qui se mènent autour du cinéma et du patrimoine culturel Togolais.

Art : Parlant toujours du cinéma, le Togo a-t-il des réalisateurs ?
J.F.A : Il y en a ! mais c’est la réalisation qui pose problème en terme surtout de qualité et de compétitivité à l’international. Heureusement que de plus en plus, les jeunes ont compris qu’il faut miser sur la qualité. Je crois que ça commence à venir puisqu’au FESPACO dernier, un jeune togolais avait été primé. C’est vrai qu’il existe une école de cinéma assez qualifiée au Togo mais beaucoup de jeunes se lancent également dans l’auto -formation. Enfin, l’effort du Ministère de la Culture à travers le fond d’aide à la culture entre 2013-2014, a suscité beaucoup d’engouement et a boosté le secteur en termes de réalisation de films. Nous espérons que les films qui seront réalisés à partir de ces fonds d’aide pourront valablement représenter le Togo à l’extérieur. Déjà au FESPACO dernier, notre pays y était bien représenté et cette année, beaucoup de réalisateurs togolais se préparent pour participer également au ” Clap Ivoire”.
Le mal du cinéma togolais aujourd’hui, c’est le manque d’appui technique et de financement. C’est pourquoi les réalisateurs sont réduits à leur plus simple expression; c’est-à-dire qu’ils font des films avec les moyens de bord. Vous conviendrez avec moi que le cinéma nécessite de grands moyens et que ” la plus belle femme au monde ne peut donner que ce qu’elle a” . Le Burkina a une grande chance parce qu’il abrite le FESPACO et à mon avis, c’est un grand stimulant pour les burkinabé à mieux faire.

Art : Finalement, quelles solutions pour booster davantage l’industrie cinématographique au Togo ?
J.F.A : Le ministère a fait un grand pas à travers le fond d’aide (ce qui est déjà à féliciter), mais il faudrait que les réalisateurs togolais se battent pour produire des films de qualité. Il faut qu’ils libèrent leur génie pour trouver des financements à leur projet parce qu’il leur revient en dernier ressort de prouver aux bailleurs ou aux sponsors que leur projet est porteur. Il y a des réalisateurs qui nous proposent des films que nous ne pouvons malheureusement pas diffuser à cause de leur mauvaise qualité. C’est autant de cas déplorables et de gâchis financiers qui anihibent souvent les efforts des réalisateurs.
Artistebf,

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