Appoline TRAORE, réalisatrice

Appoline TRAORE, réalisatrice

A.T: Je suis née au Burkina Faso mais j’ai passé l’enfance à l’extérieur notamment dans la sous région et en Europe puisque mon père travaillait pour le compte de la FAO. On a donc un peu bougé. Pendant 10 à 12 ans, je suis restée aux Etats Unis où je fis mes études. Après l’obtention de ma maîtrise en cinéma, je suis revenue en 2001 au pays pour présenter mon premier court métrage “le prix de l’ignorance” qui a remporté le prix du Jury au FESPACO. Depuis 2005, j’ai décidé de m’installer au Burkina Faso.

Artistebf (Art) : Combien de films avez-vous réalisés à cette date ?
Apolline TRAORE (A.T.) la première œuvre faite au Burkina est “MOUNERAMA” en 2002

“KONANDI” ( court métrage )

“SOUS LA CLARTE DE LA LUNE” ( long métrage )
“le TESTAMENT” (série télévisée)

Art : – Nous vous avons vu chanter avec la princesse Djata lors de la célébration des 50 ans de la RTB. Ceci nous a donné l’occasion de découvrir en vous d’autres talents cachés. Voudriez-vous aussi essayer la musique ?
A.T. : Non ! ( rires). C’est vrai que j’aime bien la musique mais je doute fort que ce soit le cas. D’ailleurs, je ne crois pas que j’ai une belle voix pour ça. Seulement c’est un plaisir de chanter de temps en temps avec des gens dont j’apprécie la musique. Il y a des artistes musiciens dont les chansons touchent et on a envie de les accompagner. Je l’ai déjà fait avec le film “MOUNERAMA” . C’était la première fois que je faisais un DUO avec un artiste sur scène. Cette fois, c’est Yacouba TRAORE, le DG de la RTB qui, à l’occasion du lancement du film le “TESTAMENT” à la rentrée télévisuelle, m’a encouragée à faire un DUO avec un artiste- musicien comme je l’avais fait en 2002. J’ai donc eu l’accord de l’artiste Djata avec qui j’avais beaucoup travaillé . Voilà comment c’est parti.


Art : « Le testament », est un feuilleton qui interpelle chacun de nous à plus de responsabilité où chaque famille africaine s’y retrouve. Comment avez-vous été inspirée ?

A.T. : Oh là ! Je ne sais pas mais… j’éprouve toujours des difficultés à répondre à chaque fois que l’on me pose une telle question. J’avoue que je n’ai jamais eu des idées préconçues; c’est de manière occasionnelle, dans les causeries, pendant un dîner, à tout moment, les idées naissent… Pour ce qui est du film le “TESTAMENT” par exemple, c’est après une émission télé sur TF1 que l’histoire m’est venue comme ça. Maintenant, qu’est-ce qui m’a inspiré ? ; je ne saurai vous le dire. Par contre, j’avais à l’idée de réaliser quelque chose sur le thème “TESTAMENT” sans pour autant savoir comment m’y prendre pour le développer et lui donner forme afin que le message passe. J’ai choisi ce thème parce que je me suis rendu compte qu’en Afrique, il n’y avait pas assez cette culture qu’un père laisse un testament à la famille. C’est regrettable et même dommage que les gens y songent rarement ou presque pas . C’est vrai que les déchirures ne manquent pas même en présence d’un testament; mais il a au moins l’avantage de régulariser certaines choses vis-à-vis de la loi.

Art : En ces temps où le cinéma manque de financement, quels ont été les difficultés auxquelles vous avez été confrontées ?
A.T. : Ecoutez ! Quand j’ai écrit le testament, je m’attendais à des financements de type classique bien connus de tous les réalisateurs, c’est-à-dire des financements extérieurs .
C’est un jour, je suis allée échanger avec Mr Yacouba TRAORE, le DG de la RTB pour lui parler du projet “m’pama fô” (émission télé de camera cachée) puis, d’une série télé que je m’apprêtais à réaliser. Quand il eut connaissance du synopsis (qui l’a certainement bien accroché), il m’a tout de suite mis la pression pour que tout soit prêt pour la rentrée télévisuelle d’octobre 2009. Notons en passant que Mr Yacouba TRAORE m’a toujours soutenu depuis la réalisation de mon film “MOUNERAMA”, et c’est vraiment quelqu’un à qui j’ai foi. Et je dis que c’est grâce à son soutien et à ses encouragements que mon équipe et moi avons tenu le coup malgré la précarité de nos ressources financières. J’avais un défi à relever à tout prix ; mon équipe l’avait aussi compris et depuis, nous sommes restés solidaires jusqu’à la fin .

Art: Faire aujourd’hui un film est un grand exploit mais la rentabilisation est une autre gymnastique. Comment comptez-vous rentabiliser le “TESTAMENT” ?.
A.T. : La priorité est d’abord à la RTB en tant que co-productrice de la série. Ensuite, il faut prospecter auprès des chaînes de télévisions francophones de la sous région et d’Europe et même voir dans quelle mesure, je pourrai le doubler en anglais pour les pays anglophones.

Art: Si ce n’est pas discret, combien ce film vous- a – t-il couter ?
A.T. : Mais c’est connu ! 27 000 000 de francs CFA (apport personnel compris) soit l’équivalent de 41 221 Euros .

Art: Quelle appréciation générale faites-vous de notre cinéma tel qu’il se présente aujourd’hui ?
A.T. : Je pense que … hum !!! (un peu embarrassée). Je pense qu’il est en train de baisser..! Malheureusement ! Sincèrement, je crois qu’il est en train de baisser. Le Burkina avait très bien démarré avec la génération de très bons réalisateurs comme Gaston KABORE, Idrissa OUEDRAOGO, Saint Pierre YAMEOGO. Ces cinéastes ont prouvé à l’Europe notre capacité à faire de beaux films. Malheureusement, la vidéo a éclaté et chacun est devenu “caméraman”. Je ne condamne pas de telles initiatives. Mais il faut faire attention pour ne pas tomber dans les films de très bas niveau. Ce serait très grave !. Il faut absolument faire la part des choses en dissociant le cinéma d’Art et les films populaires qui nourrissent les salles et qui ne peuvent pas représenter le Burkina à l’extérieur. Ces films ne sont bons que pour les salles et point final ! A mon avis, ce n’est pas la quantité de films produits qui compte mais plutôt la qualité.

Art : Etant donné la rareté des financements, quelle stratégie faut-il mettre en place pour intéresser le secteur économique burkinabé ?
A.T. : On ne peut pas compter sur nos opérateurs économiques pour faire avancer le cinéma. Dans les autres pays, ce n’est pas comme ça que les choses fonctionnent. Je ne vois pas un opérateur économique de la place qui voudra débourser trois cent millions pour aider un cinéaste à faire un film. Ce n’est pas possible ! L’opérateur économique a aussi ses priorités. Je crois que le gouvernement doit en premier lieu s’impliquer dans le métier en mettant par exemple à la disposition des réalisateurs, un budget cinématographique qui servira de fonds de roulement avec des critères de fonctionnement clairs aussi bien pour les octrois que pour les remboursements des prêts aux cinéastes.


Art : Votre mot de fin pour terminer

A.T. : Je voudrai, à l’endroit de mes comédiens et de toute l’équipe technique qui m’a accompagné, leur dire que je suis extrêmement fière d’eux parce qu’ils m’ont accepté telle que je suis; parce qu’ ils se sont beaucoup donné pour moi. Aujourd’hui, si on parle bien du “TESTAMENT”, c’est grâce surtout à eux car je ne suis pas la seule à faire ce film. Je les remercie pour le grand boulot abattu, pour les échanges et l’esprit d’équipe qui nous a animé durant tout le tournage. L’aventure n’est pas terminée et je souhaite que nous puissions rester toujours soudés (parce que nous sommes désormais des membres d’une même famille) afin que les prochaines saisons soient meilleures.

Enfin, nous demandons au ministère de la Culture de continuer de nous soutenir car nous en avons toujours besoin.
Date anniversaire : 12 Septembre

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