Cinquantenaire du Fespaco avec Bassirou SANOGO

Cinquantenaire du Fespaco avec Bassirou SANOGO

Le début de la nationalisation des salles de ciné en Afrique

La nationalisation des salles de ciné en Afrique; un fait banal à l’origine mais qui a suffisamment fait du bruit et tache d’huile dans la sous-région. Voici l’histoire avec Bassirou SANOGO. Mais avant, parcourons en quelques secondes le portrait de l’homme.

Ancien enseignant au CIERO et ancien collaborateur de l’hebdomadaire Jeune Afrique, Bassirou SANOGHO  a auparavant exercer à la radio nationale de Haute-Volta. Il est probablement le dernier Ambassadeur du Burkina en  Arabie SAOUDITE sous le régime Thomas Sankara. C’est à partir de son année de Maîtrise à Strasbourg  que notre invité s’est intéressé au cinéma en préparant un mémoire de DEA sur le cinéma africain suivi de la rédaction d’une thèse de 3ème  cycle sur le Fespaco.

Retraité depuis bientôt 15 ans, notre septuagénaire (le sang révolutionnaire toujours dans les veines et refusant la voie de la facilité) n’a jamais reçu de distinctions honorifiques du Ministère de la culture malgré ses nombreux services loyaux rendus à la nation et pour ses actes combien nobles en faveur de la culture Burkinabè. Aujourd’hui encore, malgré le poids de l’âge, son expertise est toujours sollicitée pour rendre hommage à un festival comme le FESPACO vieux de 50 ans.

Notre cri de cœur est donc véritablement à l’endroit du Ministère en charge de la culture afin que le mérite de cet homme soit reconnu de son vivant plutôt que lui conférer des actes à titre posthume.

Nous insistons sur cet aspect non pas pour lui rendre justice mais surtout pour encourager la droiture, le travail bien fait, l’abnégation et l’esprit de sacrifice au détriment des courtes échelles ou des récompenses de complaisance.

En attendant que cet appel soit entendu, retrouvons Bassirou SANOGO sous l’arbre à palabre du Fespaco.

A Gauche et à l’ext. droite : l’actrice Américaine Marpessa Dawn et Madame Mensah©ArtistesBF2019

Bassirou SANOGO : (B.S ) : J’ai depuis le 10 novembre 2018, 70 ans. Je suis à la retraite administrative depuis bientôt quinze (15 ans) et demi. Comme vous l’avez dit je suis journaliste de formation mais surtout j’ai étudié les sciences de la communication jusqu’à un niveau de doctorat. J’ai enseigné la communication au Centre Interafricain d’Etude à la Radio Rurale de Ouagadougou (CIERRO) pendant 5 ans. J’ai exercé comme journaliste à la Radio Diffusion de Haute Volta de 78 à 80. Auparavant, j’ai été collaborateur de l’hebdomadaire Jeune Afrique de 76 à 77. Par la suite, j’ai été ambassadeur de mon pays en Algérie et en République Arabe Saoudite sous le régime du Président SANKARA et ce, jusqu’en octobre 1987. Retraité depuis donc 15 ans administrativement, je suis dans l’associatif ; mais également dans la consultance.

Vous avez dit que le journalisme mène à tout. Oui ! c’est effectif parce que j’ai même connu un journaliste qui est devenu président de la république. Le président Kagamé par exemple était d’abord ministre de la défense et son président, c’était Pasteur BIZIBINGOU, président du Rwanda .  Il a été mon cadet à l’école de journalisme de Strasbourg. Il était le promotionnaire d’un de mes cadets voltaïques Joseph KAHOUN. Le journalisme mène à tout et disons que je me suis personnellement intéressé au cinéma à partir de mon année de maîtrise à Strasbourg. J’ai fait un mémoire de DEA sur le cinéma africain et cela m’a conduit à la réalisation d’une thèse de 3ème  cycle sur le Fespaco en tant que structure de promotion du cinéma africain. Disons que ce n’est pas le seul domaine d’activité qui m’a intéressé en tant qu’homme de culture. Je me suis aussi donné dans la sauvegarde de l’environnement parce que j’ai créé dans les années 89 avec d’autres compatriotes voltaïques, l’Association Burkinabé de la Sauvegarde de l’Environnement. J’ai été Président de l’ONAP, l’Observateur National de la Presse au Burkina Faso et également, Président de l’alliance contre la faim et la malnutrition au Burkina Faso. Dans ce cadre, la FAO , à l’occasion du 7ème  anniversaire de son existence, m’a décerné une médaille de reconnaissance, il y a  déjà 3 ans de cela.

La naissance de la Semaine du Cinéma

Le cinéma a été un amour de jeunesse. J’étais un grand cinéphile. A Ouagadougou où il y avait deux cinémas qu’on appelait Nader et Simon. Plutard, ces salles ont débaptisées pour prendre respectivement les noms de “Ciné Oubri “et  ” Ciné Rialé”. Je fréquentais beaucoup les salles de  cinéma et c’est dans ce sens qu’en 69, il a été créé par un groupe d’amis cinéphiles qui étaient aussi membres du Cercle d’ Activités Littéraires et Artistiques de Haute-Volta (CALAHV), la semaine du cinéma. Et c’est avec plaisir que j’ai accueilli cette initiative d’autant que je fréquentais beaucoup le Centre Culturel Franco voltaïque à l’époque, actuel Institut Français de Ouagadougou. Et j’ai souvenance que la première édition du festival s’est déroulée dans la rotonde de l’institut français actuel. Le cinéma, c’était d’abord une source de culture et d’ouverture d’esprit pour moi. J’ai beaucoup fréquenté les salles obscures et à partir de l’université, je me suis intéressé à ce domaine en tant que moyen de communication. Cette thèse que j’ai préparée sous la direction du Directeur de l’Institut Français de Presse qui dépendait de l’Université Paris-II sous la supervision technique d’un éminent professeur de l’image ENNO FIULCHIGNONI, président du festival de Venise et  du Conseil International du Cinéma et de la télévision à l’UNESCO. C’est à ce titre qu’il a été sollicité dans les années 74-75 par la FEPACI, la Fédération Panafricaine des Cinéastes qui a exprimé et adressé une requête à l’UNESCO pour la création d’un centre de formation; d’où la création de l’INAFEC (Institut National de formation et d’Education Cinématographique) qui, de mon point de vue, constitue une des retombées du FESPACO.

Le FESPACO  a eu comme retombées de nombreuses structures. L’INAFEC peut être considéré comme une retombée, le CDC pour la distribution cinématographique et le CIPROFILM pour la production cinématographique à un niveau des pays de l’OCAM (Organisation Commune  Africaine Malgache Et Mauricienne) à l’époque. Ce CDC-CIPROFILM  a été créé et a eu pour siège Ouagadougou. C’était une préoccupation des cinéastes africains exprimée dans le cadre du FESPACO, un cadre de réflexion, d’échange visant la promotion du cinéma africain. D’autres structures ont été créées grâce au FESPACO. C’est le cas du CINAFRIQUE qu’on appelait  le “Hollywood africain” d’obédience privée qui a eu son temple à Ouagadougou. Les gens venaient du Sénégal, du Bénin pour monter leurs films dans les studios de CINAFRIQUE. Malheureusement toutes ces structures n’existent plus aujourd’hui. Le moins que je puisse dire, c’est que c’est vraiment dommage.

L’impact du FESPACO dans la consolidation du cinéma africain.

Je le disais tantôt dans la mesure où le FESPACO est un cadre où les cinéastes se retrouvent pour présenter leur film à leur public naturel, élaborent des stratégies pour faire avancer ce cinéma dans le sens structurel, du financement, dans le sens du contenu des films, il va sans dire que le FESPACO véritablement est un cadre d’échange parce qu’après la projection des films on se retrouve pour les débats, le public participe, oriente un peu les thématiques, un cadre  aussi de mobilisation militante mais surtout un cadre de montage de stratégie pour consolider ce cinéma d’un point de vue structurel , industriel et économique etc. De ce fait, je pense que c’est un festival qui contribue.

En effet, il y a eu des retombées qui sont entre autres des formations. Ils ont créé entre temps  à Alger, la Fédération Panafricaine des Cinéastes à laquelle, ils ont donné une charte, la charte du cinéma africain. Le cinéaste africain doit être un homme de culture qui conscientise son peuple, qui éclaire et qui est un militant, qui est engagé pour son peuple. C’est cette FEPACI qui a demandé la création d’une structure de formation. Elle s’est adressée à l’UNESCO qui a transmis le dossier au président du conseil International du Cinéma et de la télévision à l’UNESCO en la personne de ENNO FIULCHIGNONI. Après études, l’INAFEC a été créé dans les années 76.

Également, la FEPACI en tant qu’observateur au niveau de l’OUA a tout fait pour que les pays africains voient et examinent la possibilité de mettre en place des structures de distributions et de productions sans aller jusqu’à un niveau continental. L’OCAM qui réunissait un certain nombre de pays a pris la décision de créer des structures de production et de distribution. En 79, il y a eu des conférences successives pour le CDC-CIPROFILMS et on a retenu que le siège de ce CDC soit à Ouagadougou. Cette structure qui a été créée à la demande des cinéastes et le cadre du FESPACO a permis de murir l’idée, de la consolider et de la réaliser également.

En ce qui me concerne, j’ai connu le FESPACO à travers 3 étapes différentes.

Marpessa Dawn accueilli à l’Aéroport de Ouagadougou par les l’orchestre des GUINAROUS en 1970

Première étape : La fermeture des salles liées au départ des compagnies françaises d’importation et d’exploitation des salles

J’étais lycéen, j’étais en classe de première. Je fréquentais beaucoup l’Institut  Français de Presse, à l’époque le Centre Franco-Voltaïque de Presse où s’est tenue cette première édition. C’était la première fois que se déroulait un festival. J’ai pu découvrir avec beaucoup de bonheur un écrivain comme Sembène Ousmane, un cinéaste comme Jean Rouch, Joris Ivens un grand du documentaire Hollandais connu pour ses films de développement au Mali notamment, “Demain à Nanguila”. J’ai également pu découvrir quelqu’un comme Moustapha Hassane le nigérien, Oumarou Ganda, des journalistes comme Gaoussou Sissoko etc. Cette première édition m’a vraiment impressionné et j’ai trouvé que les cinéastes qui y participaient n’ont pas été loquas. J’ai eu l’impression qu’ils étaient vraiment surpris par ce qui se passait parce qu’ils ne s’y attendaient pas.

Tous juste après cette édition, il y a eu un élément quand même déterminant pour la suite. En effet, il y avait deux compagnies françaises (COMASICO et SECMA) qui importaient des films et qui exploitaient les salles. Ces compagnies ont décidé du jour au lendemain d’augmenter le prix des billets qui coutaient initialement 40F pour la troisième place (en briques), 75 F pour la seconde place qui était des bancs et 175 F pour la première place (en fauteuils). Ils ont essayé de passer de 40 à 50 F, de 75 F à 100 F et de 175 F à 200 f. C’était sous le pouvoir militaire de Sangoulé LAMIZANA qui est venu donc en 1966 à la suite du soulèvement populaire contre le premier président Maurice YAMEOGO.

Ce pouvoir était rigoureux, avec une certaine bonne gouvernance dans la gestion des deniers publics.  C’est Monsieur Marc  Garango alors ministre des finances à l’époque qui a dit aux compagnies de surseoir à l’augmentation  du prix des billets parce que depuis 66  le gouvernement a demandé des sacrifices à la population burkinabé, une mesure à laquelle les travailleurs ont adhéré. Ces sacrifices appelés la “Garangose” étaient caractérisés par des rabattements de salaires, la suppression de certaines indemnités et bien d’autres avantages socio-professionnels… etc. Et Garango de poursuivre pour dire que “Si en plus de ces rabattements de salaires, on doit encore les priver de se réjouir, de s’égayer au cinéma”, ce serait un peu trop ! Garango a donc dit non !

En réponse à cette requête formulée par Mr Marc GARANGO, les compagnies ont opposé également un refus catégorique. Mieux, elles menacent même de fermer.  “si vous n’acceptez pas nos conditions, on ferme” et Garango de répliquer :  “fermez ! “. Ainsi donc, les compagnies ont fermé les salles. On peut dire que cet incident, ce hasard heureux est la conjonction d’une forte personnalité (Mr Garango) appuyé par le Président Lamizana qui était un homme ouvert, très démocrate et tolérant.

Cette fermeture des salles a fait du bruit et à l’époque, on n’avait même pas de nouveaux films à projeter. Vous savez, il y a ce qu’on appelait le panier. Quand on achète les films, on vous dit que dans le panier, il y a une quinzaine de films contenant seulement 4 à 5 bons films ; donc, ce panier ne venait plus, la Haute-Volta n’était plus approvisionnée en films. Pendant des semaines et des semaines on n’a fait que rediffuser les mêmes et anciens films. C’est pendant cette crise d’approvisionnement en films, que l’Algérie est revenue   en Haute-Volta avec son film à succès ” L’Aube des damnés “. Le film a été si bien accueilli par le public au point que l’Ambassadeur de France a décidé sous la clameur de la foule de ce film de quitter la salle ; c’était en Février 70. C’est par la suite qu’est venu le coup de force avec les compagnies.

Deuxième étape : La création de la SONAVOCI (La Société Nationale Voltaïque de Cinéma)

Pendant ce temps, les appétits pour le cinéma se sont aiguisés aussi bien du côté des cinéastes africains que du gouvernement voltaïque. En effet, pendant que les cinéastes africains réfléchissaient sur les voies et moyens pour soutenir le cinéma, le gouvernement de Haute-Volta était également dans la même lancée en vue de la création d’une société de cinéma. Et c’est ainsi que Garango a créé la SONAVOCI (La Société Nationale Voltaïque de Cinéma) avec pour premier Directeur Général, Adams KONATE ; le fils de DOAMBA KONATE. Après 1984, elle prit la dénomination SONACIB (La Société Nationale de Cinéma du Burkina). Pour pourvoir nos salles en films, l’Algérie est venue au secours avec des films de sa cinémathèque, la Guinée aussi qui avait eu un succès au deuxième festival avec le film  ” … Et vint la liberté” a également envoyé des films.  Dans le cadre toujours de l’approvisionnement des salles de ciné en films, le premier directeur est allé en France pour voir un distributeur indépendant.  C’était un grand cinéaste de la nouvelle barque, Claude LELOUCHE qui a eu la palme d’or à Cannes avec le film “un homme, une femme”, en 1960. C’est ce distributeur indépendant qui nous a passé quelques films. Cette démarche du DG de la SONAVOCI a eu l’admiration et le soutien des cinéastes africains, de la FEPACI et des progressistes. Après la Haute Volta, plusieurs pays africains tels le Mali, le Bénin, Madagascar … etc. ont procédé à la nationalisation de leur salle de cinéma.

On peut aussi dire que c’est le festival en tant que cadre de discussion, de réflexion, de montage, de stratégies d’action qui a pu générer cette situation.

L’orchestre “Les Guinarous” accueille la star Américaine Marpessa Dawn en interprétant “Orpheu Negro” à l’Aéroport©ArtistesBF2019

Notre cinéma a donc pris son envol et je puis dire qu’il est extrêmement rare en Afrique de trouver une structure panafricaine qui a tenu pendant 50 ans. C’est le cas par exemple de plusieurs structures panafricaines telles Air Afrique, CDC CIPROFILMS, l’INAFEC et bien d’autres structures interafricaines visant la promotion du continent qui ont disparu. La seule qui existe, c’est un élément de fierté pour les Africains, pour les artistes, notamment pour les cinéastes Africains. Il s’agit du FESPACO, une structure qui a vécu pendant 50 ans et qui n’a jamais reculé, il faut dire bravo !

Avec beaucoup de difficultés, c’est vrai ! Le festival a été institutionnalisé en 72. C’est-à-dire qu’en 69-70, c’était encore la Semaine du cinéma Africain, ce n’était pas encore le FESPACO.

Le FESPACO véritablement a été créé en 72, donc on peut considérer que l’Institutionnalisation du festival date de 72. En 73, il a eu une cession et avec le succès du festival qui naissait, il fallait bien se préparer ; c’était l’époque du mégotage où il faut chercher l’argent, écrire le scénario, le financer, le mettre en scène et le réaliser.

Donc,  le festival n’a pas eu lieu en 73, on a préféré reculer parce qu’entretemps en 75, il y avait quelques petits problèmes de stabilité économique. En 76, ce fut un succès et les gens se sont interrogés sur le fait qu’il faut lui donner davantage de consistance et de préparation. C’était une période où un beau monde commençait à s’y intéresser ; de l’agence de coopération en passant par les différentes ambassades, tout le monde y prenait gout. Tout se passait bien malgré l’existence au même moment d’un autre festival dans la partie arabophone. Je veux parler des Journées Cinématographiques de Carthage (JCC) qui ont été créées en 1966.

Le  6ème festival a eu lieu en 79. Là, c’était véritablement le déclic à tout point de vue : organisation, participation et crédibilité de la FEPACI. Donc on peut dire véritablement que c’est à partir de la 6ème  édition que le  FESPACO a pris véritablement son envol professionnel.

Entre 79-81, il faut souligner quand même que ces cinéastes admiraient énormément la Haute-Volta. Le pouvoir Lamizana était un pouvoir militaire certes; mais un pouvoir qui s’est vraiment ouvert à la culture et qui l’a fortement soutenue. Les appuis venaient de l’Agence de Coopération  Culturelle et Technique (ACCT), des ambassades et tout le reste mais c’était une chose  d’abord voltaïque avec des fonds voltaïques, un comité d’organisation voltaïque. Le Général Sangoulé   Lamizana a été pour les cinéastes l’homme qui a vraiment contribué à l’expansion de ce festival.

Le 7ème  festival, c’était en 89, après le coup d’Etat du Colonel Saye ZERBO.

Marpessa Dawn accueilli à l’Aéroport de Ouagadougou par l’orchestre ” Les GUINAROUS” en 1970. Elle est accompagnée par Monsieur l’Ambassadeur des Etats Unis d’Amérique. Sa prise en charge (hébergement et transports compris ) a été assuré par l’Ambassade des USA.©ArtistesBF2019

Troisième étape : La délocalisation du siège et du Secrétariat de la FESPACI au Burkina

La troisième époque, c’est à partir de 87. Déjà en 85, le Burkina a souhaité abriter le siège de la Fédération Panafricaine des Cinéastes (FEPACI). Avec le pouvoir révolutionnaire en ce temps, les choses ont été facilitées. J’étais à l’époque  en poste diplomatique à  Alger. Il m’a été demandé officiellement d’intervenir auprès des sociétés algériennes pour leur signifier notre souhait d’abriter le siège de la FEPACI. C’est ainsi qu’en 1985 nous avons eu non seulement le siège mais aussi le Secrétariat Général de la FEPACI. Je vous apprends que le candidat burkinabé était en concurrence avec un grand, celui que nous considérons aujourd’hui comme le plus grand cinéaste Africain de tous les temps, Sembene Ousmane.  Il s’est présenté a été battu ; il n’avait eu que 3 voies. Il faut dire que ce n’était pas l’aura du candidat mais l’aura de la révolution de Sankara qui a beaucoup pesé.

Après les évènements tragiques de 1987, une grande majorité de la diaspora américaine a refusé de venir en 1989. C’était grave, parce que le FESPACO, ce ne sont pas les révolutionnaires qui l’ont créé. Ils l’ont trouvé après pratiquement une vingtaine d’années. Donc, il fallait sauver la situation. J’avoue que je n’étais pas à l’époque dans les bonnes grâces du pouvoir. J’avais passé quelques mois embastillé après le 15 octobre. Il fallait tout faire pour sauver le FESPACO  parce que les cinéastes ne voulaient pas venir et du coup, certains congressistes qui étaient des cinéastes voulaient profiter de la situation pour  nous enlever le siège de la FEPACI.  Pour les congressistes, avec la fin de la révolution, c’est tout comme un espoir d’un continent qui s’est éteint et donc, le FESPACO n’avait plus sa raison d’être au Burkina. Ils ont souhaité le voir déplacer en même temps que la FEPACI. Sollicité pour sauver la situation, j’ai donc accepté malgré ma situation de conduire une mission à Blaise Compaoré, Président du front populaire. Nous lui avons expliqué qu’il y avait la nécessité que le pouvoir accepte que les cinéastes africains viennent rendre hommage à Sankara sur sa tombe à Dag-noen et qu’il n’était pas bon que les révolutionnaires à travers leur contradiction internes mettent fin à un festival qui fait la fierté du Burkina depuis des années. Je ne détaille pas ce qui s’est passé mais cela a permis quand même…

Au-delà de la fête, ce cinquantenaire doit être un cadre de réflexion sans complaisance

Je remercie Dieu de m’avoir accordé une longue vie pour parler et assister à ce cinquantenaire. J’ai assisté à la naissance du FESPACO, j’assite à son cinquantenaire mais je ne souhaiterais pas assister au centenaire (rires). Je pense que la grande leçon à tirer est que les africains continuent de faire des choses sérieuses, des choses auxquelles ils croient.

Il y a très peu de structures panafricaines qu’on peut montrer aujourd’hui comme le FESPACO. C’est un motif de fierté pour les burkinabè et les africains en général. Mais je pense que c’est l’occasion de demander aux politiques d’investir davantage dans la culture. C’est la culture qui peut sauver sur le plan de développement. C’est sur les fondements culturels que les Etats comme le Japon et la Chine ont pu acquérir une certaine technologie qui les a hissés au premier rang mondial. Les africains peuvent le faire mais il faut commencer par les politiques, des politiques qui ont une certaine vision lointaine des choses. Ce cinquantenaire, au-delà de la fête doit être un cadre de réflexion sans complaisance sur la question culturelle africaine, sur l’apport conjoint des politiques et des créateurs dans un sens d’aller au rythme de l’Afrique avec ses moyens mais aussi, dans un sens d’aller vraiment en avant…

NB: Les sous titres sont de la rédaction

Propos recueillies par Hélène SEBOGO et Fatim BARRO

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